En 1974, Abdessalam Yassine prend l’initiative d’écrire au souverain. Sans aucune complaisance, il l’exhorte à revenir dans le droit chemin de l’islam et n’hésite pas à lui dicter la conduite à suivre pour une meilleure gouvernance du pays.
Quand on lit la lettre que Abdessalam Yassine a adressée à Hassan II en septembre 1974, on est avant tout saisi par le courage moral et physique de l’auteur. Comment un obscur enseignant, sans réseau de solidarité aucun – il n’est ni syndicaliste, ni leader de parti, ni membre d’un grand corps de l’Etat – ose-t-il admonester Hassan II sur un ton souvent très condescendant ?.
Nous sommes aux plus sombres moments des années de plomb, quand Yassine, alors âgé de 46 ans, prend sa plume et s’enferme plusieurs mois pour rédiger sa lettre intitulée L’islam ou le déluge. Il y appelle le roi du Maroc à revenir dans le droit chemin de l’islam, à être humble et à penser au sort de la nation marocaine qui se débat dans le sous-développement et l’ignorance. Il l’incite à renoncer aux fastes corrupteurs du pouvoir et à ses injustices, en somme à se défaire de ce qu’il appelle « l’égoïsme des rois » en suivant l’exemple du calife Omar Ben Abdelaziz. Yassine n’y va pas par quatre chemins, il assène : «Vous donnez un exemple vivant, chaque jour qui passe, par votre manipulation de l’islam […], que « la religion est l’opium du peuple ». La jeunesse de cette nation voit l’injustice, la corruption et la tyrannie brutale qualifiées d’islam. [Elle voit] que la religion est un charlatanisme dont de malins potentats usent et abusent pour asservir la masse naïve […]. Avec quelle face allez-vous rencontrer Dieu ? Dites-moi avec quelle face si vous êtes croyant ? Et faites ce que vous voulez [de moi] après. Ou alors pleurez vos péchés et votre ignorance puis recourez à Dieu, réfugiez-vous auprès de lui comme quelqu’un qui craint son châtiment, comme quelqu’un de décidé à se repentir ! Repentez-vous de votre divinisation !».
Par Maâti Monjib
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