L’Etat, tout Etat, a besoin de deux éléments essentiels pour mériter cette definition : une trésorerie bien fournie et une armée dévouée. Que l’un de ces deux éléments fasse défaut et c’est la faillite de toute la structure étatique.
En terre d’islam, les Etats se sont toujours appuyés sur la ‘assabiya tribale pour asseoir leur pouvoir politique. C’est la fameuse théorie d’Ibn Khaldoun qu’on connaît bien. Mais ce grand théoricien musulman a aussi fait référence à une autre forme de mobilisation militaire quand la solidarité tribale fait défaut : le mercenariat et l’esclavage militaire. Ce dernier semble être une particularité des pouvoirs musulmans car, depuis le IXème siècle et jusqu’à la fin du XIXème, les dynasties musulmanes ont régulièrement employé les esclaves comme soldats. Les Omeyyades ont eu leurs mawalis, les Abassides et les Fatimides leurs mameluks, et les Ottomans ont mis sur pied la fameuse et redoutable armée des janissaires. Au Maroc, l’emploi des esclaves n’était pas inconnu chez les Almoravides et les Almohades, mais ce sont les dynasties chérifiennes qui ont érigé l’esclavage militaire en système. La théorie khaldounienne du pouvoir basé sur la ‘assabiya s’arrête en fait avec les “dynasties berbères” et l’émergence, à partir du XVIème siècle, des dynasties chérifiennes. Les Saadiens ont semble-t- il mis sur pied des contingents militaires composés d’esclaves noirs, ramenés au Maroc à l’issue de la grande expédition d’Ahmad Al Mansour au Mali en 1591.
Par Mohamed El Mansour
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