Elle s’appelle Sadinna et vous n’en trouverez quasiment aucune trace dans les manuels actuels d’Histoire. Zamane possède aujourd’hui la confirmation que cette cité médiévale proche de Fès fait l’objet d’un vaste projet archéologique.
A une quarantaine de kilomètres au nord de Fès, quelques ruines anodines attendent patiemment de révéler leur secret. Ces pierres ensevelies par le temps et les mauvaises herbes sont en réalité celles d’une ville amazighe nommée Sadinna. L’embryon de la découverte remonte à 1968. Grigori Lazarev, éminent géographe, ethnologue et sociologue, spécialiste par ailleurs des questions agraires au Maroc, se trouve dans cette belle région qui tutoie le Moyen-Atlas. Il mène alors une enquête sociologique sur le douar de Sadinna, lorsqu’il entend parler de vieilles pierres dont personne ne connaît l’origine. Il remarque que ces ruines, qui paraissent bien trop anciennes pour ne pas attirer sa curiosité, s’érigent au pied d’une falaise. L’Histoire aurait pu s’arrêter là si ce n’est le flair de Grigori Lazarev qui lui fait pressentir que ces traces sont un trésor d’archéologie. Après vérification, le site n’est effectivement pas répertorié. Bien plus tard, lors de ses recherches, le géographe mué en historien repère une référence à une ville médiévale du nom de Sadinna dans un texte du géographe du Xe siècle, Ahmad Al Ishaq Al Yakubi. Dans son ouvrage Kitab Al Buldan, rédigé en 887, Al Yakubi mentionne la « Kalaa Saddina ». Il y est question d’une tribu parmi les toutes premières à figurer dans la zone d’influence de la dynastie des Idrissides. L’autre référence importante se trouve dans le fameux livre Kitab Al Istiqsa d’Ennaciri, qui révèle que le sultan Youssef Ibn Tachfine a dû livrer bataille en 1063 contre des tribus rebelles situées près de Fès. Il raconte que ces tribus acculées se sont réfugiées « dans la ville de Sadinna » et que le sultan a donné l’ordre de la démolir et de tuer tous les réfugiés. Cette dernière piste peut conduire à retracer le scénario de la chute de la ville oubliée.
En collaboration étroite avec des archéologues et des historiens tels que Brahim Akdim (doyen de la Faculté de Lettres de Fès), Grigori Lazarev se consacre actuellement à la rédaction d’un ouvrage prochainement publié pour tenter d’éclaircir le mystère Sadinna. En parallèle, une autre piste des plus étonnantes concerne cette fois-ci des ruines en Andalousie. A quelques kilomètres de la ville de Ronda, se trouve un site du nom de Sidonia, qui présente de troublantes similitudes avec celui de Sadinna. L’hypothèse actuellement retenue serait une probable « exportation » de la ville de Sadinna en Andalousie pendant le Moyen-Age. Une brèche s’ouvrirait alors pour les historiens qui tenteraient d’expliquer un tel mouvement de population, de culture et de pratiques du sud au nord. Autant de questions passionnantes auxquelles Zamane consacrera un article dès le mois de mars prochain.
Par Sami Lakmahri
Bonjour,
Peut-on savoir quel est l’emplacement exact du site? L’état des fouilles?