La minorité juive, assaillie par le doute sur l’avenir d’un Maroc indépendant, est aussi victime du mirage que leur fait miroiter le sionisme, celui de la Terre promise. Malgré toutes les promesses faites par les plus hauts dignitaires du royaume, il était illusoire de vouloir freiner un exode devenu plus qu’inéluctable.
Dans un article paru dans la revue de gauche « Perspectives Nouvelles » (New Outlook) au début des années 1980, feu Simon Levy s’attaquait au problème épineux de la participation, ou plutôt de la non-participation, des juifs marocains, en tant que collectivité sociale, au Mouvement national, et tout particulièrement à « la libération nationale » du pays. À la question « quelle a été leur attitude vis-à-vis du Mouvement national ?», il expliquait que la « minorité juive », pour «toute une série de facteurs, favorables ou négatifs, elle ne pouvait être simple, linéaire, mais au contraire, contradictoire ». Outre les effets du long processus d’occidentalisation amorcé depuis plus d’un siècle, mené au nom de l’émancipation par plusieurs acteurs agissant à l’intérieur des mellahs (en premier par les écoles de l’Alliance Israélite Universelle), et l’évolution asymétrique des relations judéo-musulmanes sous la pression de la présence française et espagnole, la mainmise des élites gagnées à la France sur les affaires juives accentuent la marginalisation dont ne veulent pas les nationalistes musulmans, mais qui s’impose en dépit de tous: «Alors que l’adoption d’une position nationaliste était spontanée pour les musulmans, le juif cherchait quant à lui la réponse à une question cruciale : quelle sera ma place, celle de ma communauté, dans le Maroc indépendant ?».
Par Mohamed Hatimi
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