Quand l’Europe avançait, l’Empire chérifien, cramponné à ses traditions séculaires, la regardait comme territoire de kouffar à éviter. Il a fallu deux défaites retentissantes, contre la France en 1844 et l’Espagne en 1860, pour qu’enfin le sultan ouvre les yeux et envoie des «missions» en Europe pour tenter de rattraper les retards accusés par le royaume.
Les historiens trouvent des traces dans les archives, et autres Rihla, qui prouvent qu’au XVIIIème siècle, au plus tard, une minorité d’oulémas et de Marocains, dont notamment des juifs et des membres du Makhzen, sont conscients que le Maroc et Dar Al Islam en général, sont dépassés par l’Europe, considérée comme pays des kouffar. Cependant, la majorité de ces gens « conscients » semblent réduire ce dépassement aux domaines techniques et organisationnels. Ce qui est presque normal à l’époque, puisque les sciences sociales et historiques modernes sont à leurs premiers balbutiements même en Europe. Cette conscience d’être dépassé par «l’ennemi» historique qui avait été méprisé et détesté, et le restait pour la majorité, pousse certains sultans à essayer d’apprendre auprès des kouffar. Cela devenait vital, notamment sur le plan militaire. Car le sentiment de puissance que le Maroc tirait de sa victoire mémorable contre les Ibères dans la Bataille des Trois Rois (Oued Al Makhazine) en 1578, n’était plus qu’un lointain fait historique. Ainsi, dès la fin du XVIIIème siècle, le sultan Mohammed Ben Abdellah envoie une petite mission de quelques membres pour suivre une formation dans une discipline maritime en Suède et au Royaume-Uni.
Par Maâti Monjib
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