La mort de l’homme fort du régime marocain survient en janvier 1983, à l’apogée de sa puissance. La thèse officielle fait état d’un accident de la circulation ; une version qui convainc peu… Trente ans plus tard, l’énigme de la chute d’Ahmed Dlimi reste entière. Pourquoi ?
Comment le destin d’un homme aussi puissant peut-il basculer si soudainement ? C’est bien là le signe d’une époque où les complots et secrets font et défont les hommes. Même les plus influents d’entre eux ne sont jamais à l’abri. Le cas de l’omnipotent général Ahmed Dlimi est sans doute le plus édifiant. Le soir du dimanche 23 janvier 1983, la télévision nationale annonce officiellement et d’une manière étrangement lapidaire, le décès du numéro deux du régime de Hassan II. Le même homme que cette propagande a jadis érigé en héros de la guerre du Sahara et de la sacro-sainte intégrité territoriale marocaine. Une disparition traitée comme un vulgaire fait divers, presque comme un banal accident de la route qui endeuille régulièrement le pays. Bien étrange paradoxe dans le traitement de la mort d’un homme qui, dans les faits, était le plus influent de son pays. Ce genre de cas entraîne inexorablement de nombreuses hypothèses, des plus farfelues aux plus crédibles. En revanche, les Marocains semblent s’accorder sur une chose : se méfier de la thèse officielle, qui suscite plus que du scepticisme. La thèse de l’accident de voiture est certes facilitée par des raisons logistiques, mais elle révèle surtout que la véritable cause du décès est désormais classée «secret d’Etat».
Difficile de ne pas penser au sinistre sort du putschiste et prédécesseur de Dlimi, le général Mohammed Oufkir. Bien que les deux personnalités soient opposées sur de nombreux aspects, elles partagent néanmoins un destin commun : une toute puissance rapidement acquise et une déchéance d’une spectaculaire brutalité. C’est sur cette même trame que se développe tout naturellement la théorie d’un Dlimi renégat, projetant le renversement de la monarchie à son profit. Une réflexion largement confortée par les deux tentatives de coup d’Etat survenues dix ans auparavant, qui ont par ailleurs indéniablement alimenté la paranoïa du monarque à l’égard de l’armée. L’année de sa mort, Ahmed Dlimi jouit d’une autorité absolue sur l’ensemble de l’armée royale. La planification rigoureuse d’un putsch aurait tout bonnement été impossible sans son implication, ou à tout le moins, sans sa connaissance. Une position consolidée de surcroît par sa fonction de patron de la DGED (Direction Générale des Etudes et de la Documentation), un service de renseignement d’une redoutable efficacité, qu’il a personnellement fondé en 1973. Celui qui détient également les rênes de la DST (Direction de Surveillance du Territoire) et de la police nationale est alors sans conteste, l’homme le mieux informé du pays. Au sein des FAR, même les officiers supérieurs semblent résignés à ne pas s’opposer à sa suprématie.
Par Sami Lakmahri
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Dlimi n’avait aucune intention de renverser le pouvoir du roi.
Lutte de leadership avec Basri. Le plus rapide a gagné.
Merci zamane
Et très bonne continuation