Un demi-siècle après sa mort, lire Camus nous invite à réfléchir sur les idéologies absolutistes poussant a tuer, hier pour l’égalité des classes, aujourd’hui au nom de la religion.
Cette année 2011 s’ouvre malheureusement sous le fracas des armes, le refus des urnes, les émeutes de la misère et le déluge des bombes. On a l’impression que les siècles passés ne nous ont pas guéris de notre intolérance, que les philosophes ne nous ont rien appris, que les artistes ont peint, sculpté, chanté pour rien, en un mot que notre siècle est entré dans le commandement absolu et reste impuissant à se dégager de ses turpitudes. Pourtant 2010, cette année qui vient de s’écouler, a coïncidé avec le cinquantenaire de la mort d’un écrivain qui a su, au moment où les idéologies les plus fortes accaparent les esprits, montrer combien l’erreur en politique suit la conviction comme son ombre. L’œuvre littéraire et philosophique d’Albert Camus au Maroc est bien connue. L’Etranger, La Peste, L’Homme révolté, Le Mythe de Sisyphe ont accompagné des générations d’élèves et d’étudiants. Mais on sait beaucoup moins ce que lui doivent le journalisme et la politique. Sans doute l’homme qui a livré un combat trop inégal contre ces idées fortes et ravageuses, qu’elles proviennent de droite ou de gauche, n’a-t-il pas mesuré à sa juste valeur la levée de boucliers que son humanisme révolté allait engendrer. Il portait également comme une croix cet attachement aveugle à son Algérie dont il renvoyait dos à dos les belligérants et qui, jusqu’à nos jours, pèse lourdement dans la balance. L’homme qui ne dit rien, ou pas grand-chose, des rapports entre les Algériens et les Français, qui occulte à sa façon le problème politique algérien, et qui est à rebours de l’histoire, n’en demeure pas moins un moraliste qui manque à ce nouveau millésime de la peur.
Par Mustapha Bencheikh
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