Redouane Ejjanoui a été, sans conteste, l’un des oulémas les plus justes de son époque. Celui dont on reconnaissait la droiture et l’érudition reste cependant une exception, en raison de ses origines. D’affiliation « nouvellement musulmane », il n’aurait pas dû accéder à de telles fonctions.
Abou Ennaime Redouane Ejjanoui, alem de la Quaraouiyine au XVIe siècle, reste une énigme pour les historiens contemporains. Faisant figure d’exception dans ce Maroc en pleine transition dynastique -des Wattassides aux Saâdiens- l’érudit influent n’a cessé de soulever des problématiques liées au statut des minorités, aux diktats de la culture hégémonique, en insistant sur le danger des relations incestueuses entre notables et pouvoir politique. Pourtant, rien ne prédestinait Redouane Ejjanoui à une telle tâche, ses origines encore moins. Sa naissance même, en l’an 912 de l’hégire, relève du prodige, car c’est bien loin d’une terre d’Islam que l’histoire de Redouane Ejjanoui se dessine. Son père, italien de Gênes et de confession chrétienne, a vécu dans sa cité un événement qui bouleversera l’avenir de sa famille. Au cours de l’une de ses prières nocturnes dans l’enceinte de la grande Cathédrale de Gênes, le père est surpris par un cheval qui, tout naturellement, se « soulage » sur le sol de la nef sainte. Il s’absente quelques instants pour nettoyer les excréments de l’animal et découvre des prêtres subjugués devant ce qu’ils croient être les déjections de la monture du Christ. Sacralisé, le crottin était ainsi vendu aux pauvres âmes tentant d’approcher le divin.
Par Lotfi Bouchentouf
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