Elevé au rang de mythe fondateur du nationalisme marocain, le « dahir berbère » aurait été, à l’instar des autres décrets, signé à contrecœur par le sultan. En 1930, année de promulgation du fameux dahir, Mohammed Ben Youssef a à peine 21 ans. La France est alors à l’apogée de l’influence qu’elle peut exercer sur le frêle souverain. L’administration du Protectorat en profite donc pour imposer une obscure politique de division du peuple marocain. En réalité, la piste d’une tentative d’évangélisation massive des Amazighs est de moins en moins crédible. Le but recherché est avant tout de rester fidèle au célèbre adage «diviser pour mieux régner». A cette époque et selon toute vraisemblance, le sultan, inexpérimenté et encore fragile, ne réalise pas la portée des dahirs qu’il marque de son sceau. Pour lui, le dahir berbère n’est qu’un décret parmi d’autres. Du côté des nationalistes, ce texte est l’occasion inespérée qu’ils attendent pour rappeler à la France son engagement, exprimé en 1912, de ne pas intervenir dans la sphère religieuse. Par calcul politique, il leur est alors impossible, eux qui ont besoin de l’image d’un rassembleur, d’accuser Ben Youssef d’avoir manqué à sa charge de sultan de tous les Marocains. C’est ainsi que le futur Mohammed V, qui ne prendra réellement ses responsabilités qu’avec le discours de Tanger en 1947, devint trop tôt un héros bien malgré lui.
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