Asma Lamrabet : Islam et féminisme
Le débat sur la place de la femme dans l’islam semble interminable. Il prend aujourd’hui une forme moderne grâce à l’apport de la nouvelle génération de chercheurs. Elle est incarnée par une femme, Asma Lamrabet, médecin et chercheuse, auteure du livre « Islam et femmes : les questions qui fâchent » (éditions En toutes lettres – février 2017). Egalité dans l’héritage, voile, polygamie et histoire du féminisme sont parmi les sujets théologiques abordés par celle dont les travaux prennent une tournure internationale. Articles consacrés, invitations aux conférences, Asma Lamrabet devient une attraction car elle navigue à contrecourant de la pensée dominante. Pour elle, Coran et Hadiths sont vecteurs d’un féminisme moderne, volontairement étouffé par les sociétés patriarcales et autoritaires. Une nouvelle lecture qui se conjugue bien volontiers avec les exigences de modernisme et de libertés individuelles.
Abdelouahed Ben-Ncer : Aux origines de l’humanité
Il est le co-auteur, avec son confrère français Jean-Jacques Hublin, d’une découverte primordiale, formalisée en mai dans la prestigieuse revue scientifique « Nature ». Celle des plus vieux fossiles d’homo sapiens, datés de 315.000 ans, sur le site de Jbel Irhoud, dans la province de Youssoufia, au Maroc. Abdelouahed Ben-Ncer, anthropologue rattaché à l’Institut national d’archéologie et du patrimoine, a donc bouleversé le schéma communément admis de l’humanité. Alors que le consensus scientifique établissait l’origine de l’humanité en Afrique de l’est, où des restes d’homo sapiens datés de 195.000 ans ont été retrouvés en Ethiopie, ce chercheur a démontré qu’un homo sapiens encore plus ancien vivait plus au nord, dans l’actuel Maroc. Pour ce faire, les deux scientifiques ont daté les fossiles, retrouvés en 2004, par la méthode de thermoluminescence. Résultat : les fossiles sont datés d’au moins 315.000 ans. Ce qui recule l’origine de nos ancêtres et place non pas une partie de l’Afrique, mais bien le continent entier comme berceau de l’humanité.
Abdelilah Benkirane : La malédiction
L’annus horribilis. Après avoir tutoyé les sommets, Abdelilah Benkirane traverse une tempête inédite en cette année 2017. L’ancien Chef du gouvernement est d’abord victime du blocage gouvernemental qui a paralysé la vie politique du royaume suite aux élections législatives du 7 octobre. Six mois après sa victoire, le leader du PJD s’embourbe dans d’impossibles tractations qui précipitent sa première chute. Il est écarté par le roi en faveur de son rival islamiste, le consensuel Saâd-Eddine El Othmani. Battu mais pas résigné, Benkirane tente de revenir au-devant de la scène en se présentant à sa propre succession au secrétariat général de sa formation politique. Un nouveau combat également perdu lors du congrès du PJD en décembre. Le bureau politique du parti de la lampe a rejeté les amendements nécessaires à une nouvelle candidature de celui qui demeure tout de même le plus populaire dans les rangs du PJD. Une année noire.
Mahi Binebine : De la feuille blanche au grand écran
Quelle année pour l’écrivain-artiste ! En mars, il a présenté au grand public son onzième livre, véritable succès critique, « le Fou du roi », où Mahi Binebine raconte sa douloureuse histoire familiale, celle de son frère enfermé au bagne de Tazmamart, accusé d’avoir participé au coup d’Etat de Skhirate en 1971 contre Hassan II, et celle de son père, conteur et amuseur du roi, qui a renié son fils. Après avoir manqué de peu le prix Renaudot, Mahi Binebine s’est investi dans sa fondation, Ali Zaoua, créée avec Nabil Ayouch. Il a notamment organisé une exposition réunissant plus de 40 artistes, dont les œuvres ont été vendues le 14 décembre à Casablanca au profit des centres culturels pour enfants, «les Etoiles de Sidi Moumen» et «les Etoiles du Détroit» à Tanger. D’ailleurs, un troisième centre est actuellement en construction à Fès. Et ce n’est pas tout. Binebine est actuellement en discussion avec Bouchra Réjani (The Voice, Masterchef), papesse de la production en France, pour adapter « Le fou du roi » au cinéma. Il s’apprête également à écrire un nouveau roman.
Hamid El Mahdaoui : Un journaliste derrière les barreaux
Ce journaliste, directeur du défunt site Badil.info et figure incontournable des réseaux sociaux, fait partie de la liste des (déjà) condamnés du Hirak du Rif, qu’il a couvert avec verve. Hamid El Mahdaoui a été arrêté à Al Hoceïma, le 20 juillet, en marge d’une grande manifestation, et poursuivi selon le Code pénal pour «incitation des citoyens à enfreindre la loi» et «participation à l’organisation d’une manifestation interdite». Après avoir écopé de trois mois de prison ferme en première instance, il a finalement été condamné à un an de prison ferme en appel. Tête brûlée, il est connu pour sa répartie incisive et est soutenu par l’AMDH et Reporters Sans Frontières. Ce natif de Kénitra, un temps vendeur ambulant pour subvenir à ses besoins et financer ses études de journalisme, a notamment fait ses armes auprès de Ali Anouzla, au sein du site Lakome. Aujourd’hui, son incarcération rappelle que la liberté d’expression est loin d’être définitivement acquise.