D’où viennent les clichés des Occidentaux sur les Marocains ? Pourquoi nous voyaient-ils comme des «barbares sanguinaires», des «voleurs avides» ? Comment ces clichés ont-ils été entretenus durant le Protectorat ? Décryptage d’un phénomène qui a la peau dure, avec l’historien Jamaâ Baïda, auteur d’une thèse dédiée au regard colonial sur le Maroc et ses habitants, et directeur des «Archives du Maroc».
Avant le Protectorat, quelles étaient les images prêtées aux Marocains par les Occidentaux, et pourquoi ?
Les regards portés sur les Marocains ne sont pas tous les mêmes et empruntent plusieurs canaux. Il y a d’abord les commerçants et négociants, les diplomates et consuls, les captifs, les hommes de religion, et enfin les voyageurs, qu’ils soient artistes ou scientifiques. Tous ces profils ne viennent pas pour les mêmes raisons au Maroc et n’éprouvent pas envers le pays et ses habitants les mêmes sentiments. Surtout, ils n’ont pas tous les mêmes intérêts. Les artistes sont à la recherche d’exotisme, tandis que les diplomates viennent conclure des traités. Ceci dit, le point commun entre tous ces visiteurs est qu’ils n’ont pas un accès facile au Maroc profond, à l’intérieur des terres, où d’ailleurs se situent les capitales impériales…
Quelle est la lecture qui prédomine, alors ?
Encore une fois, tout dépend. Prenez l’exemple d’un missionnaire chrétien du XVIIème ou XVIIIème siècle. Il est envoyé au Maroc pour tenter de négocier le rachat de captifs chrétiens. Ce personnage a tout intérêt à plaider la cause des prisonniers qu’il souhaite libérer. Pour ce faire, il doit persuader ceux qui financent ses voyages que les captifs vivent d’atroces souffrances au Maroc…
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’article dans Zamane N°112 (Mars 2020)