On peut aborder le judaïsme marocain comme l’expression confessionnelle d’une frange de Marocains, tout comme on pourrait l’aborder comme l’une des expressions de la Marocanité. Il servirait, comme toute cellule du corps, à établir l’ADN collectif…
Les Marocains de confession juive sont d’abord des Marocains, dont les ancêtres se sont convertis au judaïsme. Historiquement, la marocanité primait sur la confession. Mais dans le monde proto-moderne, c’est plutôt la confession qui a la préséance. Le Marocain musulman faisait valoir son islamité sur sa marocanité, et il était normal que le juif en fît autant. Nous parlons encore de juifs marocains. Certains, mais rares, parlent de Marocains juifs. La modernité voudrait qu’on parle de Marocains, tout court, sans autre épithète qui renvoie à la confession.
Etudier un phénomène, c’est bien sûr le comprendre, mais aussi démêler ses contradictions pour les dépasser par ce que Pierre Bourdieu appelle le malentendu sociologique.
Le travail de Joseph Tolédano sur la communauté juive de Meknès procède de ce souci. Il y a bien sûr, et c’est légitime, le souci de la mémoire. Il pourrait y avoir, peut-être, dans ce travail, un exercice de réappropriation de la marocanité.
La genèse d’une histoire commune
Trois séquences historiques ponctuent le judaïsme marocain, qui renvoient à des entités sociologiques distinctes. Il y a d’abord les autochtones, ou les premiers juifs, qui pour la plupart étaient des autochtones convertis, ceux qu’on appelle les Touchabim, dont la mémoire est encore vivace dans l’Atlas et les oasis.
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Je suis ravi qu’on puisse éclairer cette phase sombre de notre histoire marocaine.