Depuis le Moyen Âge, et jusqu’à l’époque «moderne», les épidémies et les calamités ont été accompagnées de pratiques, et de croyances, à la frontière du religieux et du superstitieux.
Si on ne prend compte que du dernier millénaire, mieux documenté, de l’histoire du Maroc, on note que les historiens et chroniqueurs évoquent trois à quatre épidémies par siècle. Cela, sans parler des famines, des guerres civiles, inondations, invasions de sauterelles et criquets, etc. En plus, bien entendu, des épidémies locales de paludisme qui étaient quasi-permanentes, sauf par temps de grande sécheresse.
Les épidémies ne font pas dans le détail. Riches, pauvres, citadins, ruraux. Tout le monde y passe. Ainsi, le sultan almohade Abou Yacoub Youssef est frappé par la peste à Marrakech en 1176. S’il s’en sort avec difficulté, de nombreux membres de sa cour y laissent la vie.
Ces calamités naturelles ou humaines s’associent, durant certaines périodes, pour provoquer des hémorragies démographiques effroyables. Elles emportent le tiers (voir la moitié, selon certains démographes) de la population marocaine. Elles marquent, par conséquent, l’imaginaire collectif et meublent d’une façon considérable le fond culturel commun.
Jusqu’à aujourd’hui, le vécu et le langage quotidiens charrient certaines expressions ou croyances qui remontent sans doute à un passé lointain, puisque les dernières épidémies et conflits fratricides ont eu lieu
il y a au moins plusieurs décennies. Ainsi, notamment à la campagne, on entend toujours l’expression «Va que Dieu t’envoie une jaïha (épidémie, calamité)!», pour appeler la vindicte divine sur la personne visée.
Par Maati Monjib
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