Le point sur un genre littéraire apparu il y a une vingtaine d’années au Maroc et qui nous remémore les sombres heures de notre Histoire récente : la littérature carcérale.
La production carcérale entre dans le paysage intellectuel marocain durant la première moitié des années quatre vingt dix. L’assouplissement du régime, la préparation d’un nouveau règne, la recherche d’une concorde nationale et la fin des deux blocs ont eu des conséquences bénéfiques sur l’édition au Maroc et plus généralement sur la liberté d’expression. De nouvelles maisons d’édition vont naître, des voix naguère bâillonnées, retrouvent leur liberté de parler et de témoigner. C’est alors qu’un genre nouveau, entre le témoignage, le journal et le roman à thèse, soutenu par une presse indépendante, prend pied et entreprend de restituer la mémoire d’une époque que les générations précédentes ont bien connue. La recherche de la vérité, le devoir mémoriel font leur chemin et si la réconciliation nationale reste possible on se demande encore comment faire lorsque l’on ne peut ni punir ni pardonner. L’Histoire à rebours commence en 1991 lorsque Gilles Perrault écrivain et journaliste français lance un pavé dans la mare en publiant Notre ami le roi. Le livre interdit au Maroc est pourtant dans la bouche de tout ce que compte la société marocaine comme politiques, intellectuels, universitaires et cadres. Il relate des faits dont les Marocains ont entendu parlé mais qu’à de rares exceptions près, tous préfèrent taire. Il lève le voile sur un jardin secret du règne de Hassan II, rescapé de deux attentats odieux, mais justicier sans scrupule. Ce réquisitoire contre un roi réputé intelligent, cultivé et moderne va ébranler la classe politique marocaine qui se prépare à vivre un moment important de son histoire.
Par Mustapha Bencheikh
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