Le dossier du mois est consacré à Dar el Makhzen, au sens large du terme. Il inclut le palais «en dur», que tout le monde connait et qui sert de résidence et de lieu de travail aux sultans. Mais aussi l’Afrag sultanien (tente ou ensemble des tentes royales, lors des déplacements politiques ou guerriers des souverains). Zamane a mené l’enquête à travers la longue histoire du royaume pour traiter, entre autres, des us et coutumes de cet espace quasi-sacré, notamment depuis le XVème siècle. Les auteurs, qui sont historiens, journalistes ou experts, traitent également du fonctionnement quotidien et de la symbolique politique et religieuse multiséculaire qui s’exerce dans cet espace toujours entouré de murs. Ceux-ci peuvent être de pierre et de terre rouge ou d’un tissu tout blanc lors des harkas. Cet espace, qui a représenté et qui représente toujours au Maroc le centre sacro-saint du pouvoir, a évolué sous l’influence des voisins et du temps qui passe…
Dans le parcours de l’Etat musulman, le palais en tant que lieu géographique de pouvoir n’apparait véritablement qu’avec les Omeyyades. Et on sait que cette dynastie a fait de Damas, et non de Médine ou la Mecque, sa capitale. Or, cette partie du Proche-Orient était fortement imprégnée de culture matérielle gréco-latine et de traditions politico-administratives byzantines. Mouâwyia, le premier calife de cette dynastie, s’est fortement inspiré de ce legs euro-méditerranéen et non de la simplicité bédouine de ses ancêtres et prédécesseurs koraichites. Au Maroc, toutes les grandes dynasties, qu’elles soient berbères ou chérifiennes, s’inspirent, concernant la logistique et la symbolique du pouvoir, des traditions locales, des Omeyyades et des Abbassides, puis des Ottomans. Pas des califes «er-rachidoun». mais il y a des exceptions. Bien entendu. Ainsi, Moulay Slimane (1792-1822), connu par sa piété et droiture, fut l’un des rares sultans qui ont relativement négligé et la majesté du pouvoir et la construction de palais. D’ailleurs, quand les représentants de la capitale Fès, ulémas et notables, viennent, en 1792, lui proposer de le proclamer roi, il pose comme condition de ne pas faire la guerre à ses compétiteurs. Aussi, quand il se fait faire un sceau, il y inscrit les noms des quatre premiers califes, indiquant par là qu’il ne faudrait pas attendre de lui poigne, majesté et palais, mais justice et modestie. Pourtant, aussi bien son arrière-grand père le sultan Ismaïl, que son père Mohammed III, sont de grands constructeurs de villes et de palais.
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