Le séisme politique provoqué par le rapport de la Cour des comptes ne se limite pas au limogeage de certains ministres. Il préfigure un changement majeur dans la composition des prochains gouvernements. L’Istiqlal, au fond du gouffre il y a quelques mois, pourrait bien en profiter.
Depuis les secousses enregistrées dans le Rif, suite à la mort tragique de Houcine Fikri en octobre 2016, la sphère politique ne cesse de trembler. Le dernier épisode est venu du Palais, lorsque Driss Jettou, président de la Cour des comptes, a remis au roi Mohammed VI son rapport sur les dysfonctionnements dans l’élaboration et le suivi du projet «Al Hoceïma, Manarat Al Moutawassit». Aussitôt, un communiqué datant du 24 octobre désignait les responsables. Les sanctions sont historiques et inédites sous le règne de Mohammed VI. Trois ministres et un secrétaire d’Etat en exercice sont limogés et quatre autres hauts fonctionnaires du gouvernement précédent sont «fichés» pour leurs défaillances antérieures. La punition à effet immédiat est amplifiée par son aspect perpétuel. Une décision encore jamais vue dans l’histoire contemporaine du Maroc et qui promet aux «coupables» de ne plus jamais occuper de haut poste dans la fonction publique. Outre la légalité et la forme de cet acte historique, les questions concernant l’avenir des formations politiques est au cœur des débats actuels. Le PJD, vainqueur des dernières élections législatives, voit sa position s’affaiblir de plus en plus. Sur le plan interne, la base du parti islamiste, restée proche de Abdelilah Benkirane, continue de tourner le dos au Chef du gouvernement Saâd-Eddine El Othmani. Le PJD est également affaibli par l’éviction des ministres PPS Nabil Benabdallah (secrétaire général du parti) et El Houssaine Louardi, et de l’ex-ministre de la Culture Mohamed Amine Sbihi. Les sanctions qui touchent le principal allié du PJD vont inaugurer un nouveau jeu de chaises musicales qui risque de modifier le visage du prochain gouvernement. Une situation dont pourrait tirer avantage le Parti de l’Istiqlal, pourtant en déroute il y a encore quelques semaines.
Le parti historique revient en effet de très loin. Après avoir été la risée de la scène politique et des réseaux sociaux lors de son dernier congrès fin septembre dernier, l’Istiqlal sort d’une période trouble où les partisans de Hamid Chabat et ceux de Nizar Baraka se sont livrés à une véritable bataille rangée. Ce dernier, qui a réussi finalement à s’emparer du secrétariat général, pourrait peser à nouveau sur l’échiquier politique. Si l’Istiqlal est invité à rejoindre le gouvernement, les cartes devraient être à nouveau distribuées et le visage de l’Exécutif remodelé.
En attendant de nouveaux rebondissements liés à ce séisme politique.