Aujourd’hui encore, le Maroc est souvent considéré comme une mosaïque religieuse. La diversité de nos croyances découle en fait des influences multiples de notre Histoire : conquérants sunnites et exilés chiites ont donné au Maroc sa couleur locale si particulière : un chérifisme profondément ancré dans notre culture.
L’islam est arrivé en Afrique du Nord il y a près de 15 siècles.Une conquête qui a duré plusieurs décennies et qui a ensanglanté les plaines et les massifs de l’Occident musulman. Au début, les armées omeyades, partisanes d’un islam orthodoxe, et porte-paroles du califat oriental imposent, tantôt par les armes, tantôt par la prédication, la foi du seigneur de Damas. Les séquelles de la grande fitna, à savoir la guerre entre les partisans d’Ali et les adeptes de Mouawiya, sont encore très vives. Le premier clan, qui portera plus tard le nom de chiites, est alors partout persécuté dans le monde musulman fraichement constitué. Mais dans ce combat, où le politique recoupe le religieux, une autre faction, aussi puissante et déterminée, ne tarde pas à émerger : les kharijites, qui seront eux aussi pourchassés par les Omeyades. L’Afrique du nord, terre de guerre et d’insoumission, devient le refuge de tous les «damnés» du Moyen Orient.
Ahl Al Bayt ou la lignée sacrée
En fait, et ce n’est un secret pour personne, les causes de la grande fitna et la complexité des interrègnes en pays d’Islam remontent à la mort du prophète Mohammed. La légitimation du prétendant au pouvoir a en effet, dès le début de l’islam, oscillé entre choura (concertation) et droit du sang. C’est de cette dichotomie que naît la notion d’«Ahl Al Bayt», littéralement «les gens de la maison», celle du prophète bien entendu, une sorte de lignée sacrée. Si, à la mort du prophète, sa sacralité est fortement évoquée, elle n’est néanmoins pas encore instituée et la notion de choura, pratique souvent promue par le prophète lui même, concurrence déjà celle de «droit du sang». Du coup, c’est par une autre approche qu’est réglée la succession du prophète : celle de la proximité.
Par Mostafa Bouaziz
Lire la suite de l’article dans Zamane N°3