Depuis des temps immémoriaux, la légitimité politique passe inévitablement par la violence, donc par la peur. Si c’est de moins en moins le cas au Maroc, imposer sa loi par la terreur était une routine communément admise. Pour s’imposer, l’autorité politique doit donc faire peur à ses administrés. Que ce soit le Makhzen ou des envahisseurs étrangers, tous ont recours à la peur comme mode de gouvernance…
Moulay Ismaïl (1672-1727) est certainement l’un des sultans les plus puissants (et violents ?) de l’histoire du Maroc. Il est aussi l’un des rares à s’ouvrir sincèrement à l’étranger. Pour ce faire, il n’hésite pas à décrire aux autres son peuple et sa façon de le gouverner. C’est ainsi qu’il s’adresse au Parlement anglais dans une lettre datée du 22 septembre 1706 : «Mes sujets ne prennent les choses au sérieux, ne se mobilisent et ne travaillent avec ardeur et acharnement, que par crainte et par peur de la présence de leur sultan». Ce ton paternaliste fait partie de la rhétorique classique des tenants du pouvoir au Maroc. Plus de deux siècles et demi plus tard, son descendant direct continue d’utiliser cette forme de langage. Hassan II, friand de l’adage « qui aime bien châtie bien », n’hésitait pas à appliquer la formule durant ses 38 ans de règne. C’est en effet bien lui qui, dans une interview, se disait prêt à sacrifier un tiers de sa population selon les préceptes du rite malékite (selon Hassan II).
Par Sami Lakmahri
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