Simone Bitton se dit « universaliste ». Et pour cause, elle est née à Rabat où elle a grandi au sein d’une famille juive marocaine. Emportée par la vague d’immigration de sa communauté, elle se retrouve à 11 ans perdue dans une société israélienne dont elle dénonce aujourd’hui « le nationalisme maladif ». C’est à Paris qu’elle épouse le cinéma pour devenir la documentariste auteur de films devenus références. Le Moyen Orient, Mehdi Ben Barka, le judaïsme marocain, Simone Bitton raconte sa vie, son œuvre…
Vous venez de terminer le tournage de votre prochain film, « Ziyara (visite) ». De quelle visite parle-t-on ?
De la mienne. C’est un long métrage dans lequel je visite le Maroc en m’attardant sur les lieux où se trouvent les traces du judaïsme marocain. Ces endroits, sacrés ou profanes, portent la mémoire juive dans le pays. Sur mon chemin, j’interroge des Marocains, tous musulmans, qui sont les gardiens de cette histoire. Je les appelle « les gardiens musulmans de ma mémoire juive ». Eux et leurs familles s’occupent des cimetières ou de sanctuaires dont la plupart sont à l’état d’abandon depuis des années. Ils se transmettent cette charge comme un héritage précieux et ils sont aujourd’hui les meilleurs garants de cette mémoire. Ce film est parti sur une simple question que je me posais : que reste-t-il de nous au Maroc ? La réponse est formulée d’après les récits que j’ai recueillis et qui ne concernent que les musulmans. Aucun juif n’apparait dans le film.
La préservation de la mémoire juive est devenue depuis quelques années l’une des priorités culturelles de l’Etat. Cela se ressent-il dans le film ?
Ce film répond à mes aspirations et à mes interrogations. Je ne le réalise pas en fonction des tendances politiques. D’ailleurs, les séquences qui m’ont le plus marquée ont été tournées dans des coins reculés, où l’initiative que vous évoquez n’est pas encore visible. Je n’ai pas choisi de traiter ce sujet en fonction de l’actualité.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
Lire la suite de l’article dans Zamane N°105/106 (Août/Septembre 2019)
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