Sous couvert de mission civilisatrice, le Protectorat a surtout installé un « apartheid » de fait.
Dans des documentaires faits par les soins de Pathé sur la vie coloniale dans les villes de Fédala (aujourd’hui Mohammedia), Casablanca ou Mogador, au lendemain de la Deuxième Guerre Mondiale, on voit des images d’un Eldorado où les habitants, tous des Européens, mordent à la vie, avec courses de voitures, fiesta, barbotement dans la grande piscine de Casablanca, devanture verdoyantes de demeures. La jouvence, la gaité, se mêlent à la luminosité du soleil et à la joie de vie.
On voit par ailleurs quelques images de l’œuvre coloniale, avec la mise en valeur de la plaine de Tadla, le grand barrage de Bin el Ouidane, de belles villes aménagées, propres, avec de beaux palmiers dans les grandes artères… Voire quelques images de communion avec les autochtones ou, disons, les « indigènes » pour utiliser le terme en vogue.
Mais combien cette image est trompeuse ! Car elle ne reflète que la vie du colon qui était Européen, Français surtout. Tout le reste n’est qu’un simulacre ou caricature. L’expérience coloniale est l’expression de deux communautés qui se jouxtent et qui s’ignorent.
C’était le vice rédhibitoire de l’expérience coloniale. La France, malgré le précédent algérien et le sinistre « Code de l’Indigénat », n’a pu, au Maroc, éviter les travers du colonialisme. L’œuvre coloniale s’est faite en dehors du Marocain, et souvent contre lui, comme dirait l’historien Daniel Rivet.
Lire la suite de l’article dans Zamane N°102 (mai 2019)