Le statut de protégé diplomatique et consulaire octroyé par les puissances étrangères à certains citoyens marocains au siècle dernier participait à des manœuvres de déstabilisation du pays par la remise en cause de sa souveraineté. Entre autres.
Le Maroc n’a été officiellement colonisé qu’en 1912. Il était le dernier pays de l’Afrique du Nord à perdre son indépendance. Mais dans la réalité des faits, il est le pays qui a subi la plus longue pénétration coloniale. Plus d’un siècle de convoitises, de pressions, de guerres et de fragilisation de l’intérieur. Depuis le XVIIIème siècle, la menace européenne pointait son nez. Mais elle ne devenait précise qu’après la prise d’Alger en 1830 par les Français. Le Makhzen chérifien s’estimait en mesure de contenir cette pression, et le cas échéant de la réduire par l’affrontement armé. Mais ses défenses ont été vite pulvérisées par deux grandes défaites militaires. Celle de l’Oued Isly en 1844 devant les armées françaises venant d’Algérie, et celle de Tétouan en 1859/1860, suite à une invasion des troupes espagnoles venant de Ceuta et du littoral méditerranéen. Depuis, le Makhzen a intériorisé avec amertume la défaite militaire. Il bannissait définitivement de son champ de ripostes tout recours aux armes, tant il se voyait d’avance vaincu et défait. Aussi n’importe quelle évocation d’une éventuelle confrontation militaire avec une puissance européenne devenait immédiatement une arme de persuasion et par conséquent une porte ouverte à des concessions, parfois de taille. Tout au long du XIXème siècle, le pouvoir sultanien s’est vu perdre, morceau par morceau, et sa souveraineté et sa légitimité. La Grande Bretagne, grande puissance de l’époque, a été sollicitée par le Maroc pour atténuer les pressions françaises et espagnoles. Elle négocia son intervention en imposant au Makhzen la signature du traité de 1856. Ce traité imposait au Maroc une sorte de libre échange qui mettait fin aux protections douanières qui sauvegardaient le tissu productif du pays et l’équilibre des marchés et des échanges. Ce fût la plus grande déstabilisation du système marocain.
Par Mostafa Bouaziz
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les protégés , une parenthèse douloureuse dans l’histoire du Maroc , la bataille de Tetouan et les 100 milles pesetas réclamés comme indemnités par les espagnoles pour se retirer de Tetouan et le prêt consenti auprès de la grande Bretagne à un taux prohibitif sont les ingrédients d’un état en faillite ouvrant la porte ouverte à une mise sous tutelle d’un état qui n’avait d’état que le nom.