Sous Hassan II, le pouvoir centralise et contrôle les chorfa, au point de laisser penser que les citoyens sont tous égaux et que l’Etat de droit transcende toutes les traditions. Dans les coulisses, pourtant, le roi fait jouer les ascendances chérifiennes pour offrir des passe-droits à ses plus zélés serviteurs ou aux proches du sérail.
Après l’indépendance, les chorfa ne suscitent que très peu d’intérêt. Pourquoi? Tout simplement parce qu’ils ont été balayés par le discours nationaliste, unificateur et égalitariste; tout l’inverse de ce que prône le chérifisme. Pire, les chorfa, notamment les Idrissides, sont parfois facilement assimilés à des «collabos», voire à des ennemis de la monarchie alaouite à cause du rôle qu’ils ont joué au début du XXème siècle. Ainsi, à l’époque, tout le monde ou presque se souvient de Mohammed Ben Abdelkebir El Kettani, qui a été un opposant de Moulay Abdelaziz, puis de Moulay Hafid. Son frère, Abdelhay El Kettani, a quant à lui scellé une «alliance sacrée» sur le tombeau de Moulay Idriss avec le Pacha El Glaoui, «à qui on s’évertua à confectionner une généalogie idrisside (!) – contre Feu Sidi Mohammed Ben Youssef, ce qui déboucha sur l’exil de la famille royale légitime en 1953 », écrit Abdellatif Agnouche, enseignant-chercheur et professeur de droit à l’université Hassan II, dans «Les chorfa face à « l’Etat de droit » dans le Maroc contemporain». Conséquence, face au manque d’intérêt des pouvoirs publics, les chorfa s’organisent. Pour cela, ils bénéficient du dahir du 15 novembre 1958 relatif aux libertés publiques.
Par Nina Kozlowski
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