Une phrase suffit pour résumer le changement : le Maroc a enfin une politique culturelle. Imparfaite, incomplète, tablant d’abord sur la quantité en attendant la qualité et souffrant d’une marge de liberté encore faible. Mais elle existe, enfin !
Le changement le plus spectaculaire, peut-être le plus immédiat, a affecté la peinture. Quoi de plus logique. Les initiés le savaient déjà, depuis toujours : Mohammed VI aime la peinture. Dès son intronisation, il donnera le ton : il faut consommer local, marocain. Le prince devenu roi n’a rien perdu de sa passion. Au contraire. Alors il achète, il consomme, avec une prédilection pour les peintres marocains. Et l’effet boule de neige aura lieu. La cote des peintres marocains remonte. Les anciens comme les nouveaux. Dans la foulée, les intermédiaires (marchands d’art, agents, maisons aux enchères, galeries) se multiplient. Les offices, les ministères et pratiquement toutes les institutions officielles achètent aussi, dans une sorte de mimétisme royal. Les particuliers aussi sont de la partie. À côté des collectionneurs et des inévitables «hommes d’affaires» (acheteurs-revendeurs), c’est la haute bourgeoisie qui se pique de passion pour l’art en général, et la peinture en particulier. Même les hommes politiques, souvent hermétiques à toute forme d’art moderne ou contemporain, sont également «contaminés». L’art et la peinture quittent ainsi les salons feutrés et les intérieurs des villas cossues. Ils sont exposés, étalés. Des «foires» voient le jour. Il ne s’agit pas seulement de consommer ou de faire des bonnes affaires, mais aussi de (se) montrer. Comme un signe de ralliement social et économique.
Par Karim Boukhari
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