Entre les premières rebelles de l’Histoire et les mouvements féministes d’aujourd’hui, la résistance à l’occupation coloniale a donné l’occasion aux femmes de gagner leurs premiers galons de militantes et de batailler pour leur statut.
Le statut de la femme dans le Maroc précolonial est ambigu. Elle est à la fois l’esclave et l’adorée, le centre et la périphérie, celle par qui le scandale arrive et celle qui est dépositaire de la tradition, la bonne tradition s’entend. Au sein de cette communauté marocaine, puisqu’il est encore trop tôt pour parler de nation, où prévaut l’hégémonie du groupe sur l’individu et du masculin sur le féminin, la femme est définie au regard de sa situation. Dans les unités de production, elle est une force de travail qui doit se prêter à l’exploitation en silence, évitant toute manifestation singulière. Elle doit produire sans se faire remarquer. En tant que mère, elle a droit au respect car c’est elle qui garantit la reproduction du système conservateur. Là, son pouvoir est important : elle participe à l’élaboration du système de valeurs communautaire et à la structuration de l’imaginaire collectif. En tant qu’amante, elle est l’adorée, la désirée, la reine des sens. Son pouvoir de séduction est immense, mais il dure le temps des roses. Le temps d’une passion et parfois le temps d’une simple étreinte. Il arrive exceptionnellement que la femme marocaine, comme sous d’autres cieux, acquière un certain pouvoir politique et social. Quand c’est le cas, elle y accède à partir de sa situation de mère, d’amante ou d’épouse d’un homme de pouvoir. Son petit pouvoir devient alors grand à travers le seigneur qu’elle influence dans son cercle privé. La Séléné, la Kahina, la Nafzaouia et autres El Horra sont des exemples de cette irruption de la femme dans l’espace masculin du pouvoir.
Le choc de la modernité occidentale
Dans ce monde communautaire précolonial, la femme militante au sens où nous l’entendons, c’est-à-dire celle qui adhère à une cause et agit avec abnégation pour la défendre, n’existe pas. Certes, l’Histoire a enregistré des cas de femmes révoltées. Ce sont des rebelles isolées dont l’action a souvent été étouffée dans l’œuf avant de donner naissance à une cause partagée par d’autres.
Par Mostafa Bouaziz
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