Rares sont les sultans marocains qui osent faire face à la mer. Mais Sidi Mohamed Ben Abdellah est un atypique. Plus qu’une simple orientation géopolitique, la mer devient un élément vital de son règne. Elle illustre son sens du commerce, sa diplomatie audacieuse et son empreinte de sultan bâtisseur…
En grande difficulté, avant même son intronisation, c’est vers la mer que Mohamed Ben Abdallah trouve son salut. Fraîchement nommé Khalifa de son père le sultan à Marrakech, le jeune prince cherche à s’échapper d’une étouffante hostilité. Envoyé dans la ville ocre par son père et sultan Moulay Abdallah en 1746, celui qui deviendra Mohamed III se retrouve malgré lui dans un véritable traquenard. L’illustre Marrakech qu’il doit désormais gouverner n’est plus qu’un vaste champ de ruines, vidée de la majorité de sa population et minée par l’insécurité et la violence. Car l’ancienne capitale impériale est l’une des victimes des trente années de chaos qui ont suivi la mort de Moulay Ismaïl en 1727. Y rétablir l’ordre et la sécurité est un immense défi pour le jeune prince, rapidement pris à partie par des tribus hostiles au pouvoir central incarné par son père. Face à un tel danger, Mohamed Ben Abdallah décide de fuir la cité pour se diriger à l’Est, vers la côte atlantique. C’est dans la ville portuaire de Safi, en bord de mer, que le prochain sultan du Maroc va, non seulement trouver du répit, mais aussi entamer son irrésistible ascension. C’est ainsi que débute la singulière histoire entre le sultan et le littoral marocain, radicalement métamorphosé au bout des trente trois ans de règne de Mohamed Ben Abdallah. Une transformation rendue également nécessaire par l’une des plus grandes catastrophes naturelles de l’Histoire du royaume. Le 1er novembre 1755, soit deux ans avant l’accession au trône de Mohamed III, un terrible séisme survenu au large de la ville de Lisbonne. Les chroniques contemporaines évoquent un violent tsunami qui a balayé les villes et places de la côte atlantique marocaine.
Par Sami Lakmahri
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