En juin 1959, le roi Mohammed V se rend personnellement dans le Rif, mettant fin à plusieurs mois d’affrontement militaire entre son armée et des rebelles rifains. Retour sur la dernière harka de l’histoire du Maroc.
L’autorité du sultan est enfin rétablie. Il peut désormais parader dans une région d’apparence apaisée. Les armes sont baissées et les impôts dus au pouvoir à nouveau payés. Nous sommes bien dans le nord du Maroc indépendant en juin 1959. À cette date, s’achève ce qui ressemble bien à la dernière harka de l’histoire du Maroc. Soixante ans après, la mémoire retient encore cet épisode important dont les conséquences sont toujours visibles aujourd’hui. L’histoire de la rébellion du Rif relève toutefois plus des tensions politiques qui ont secoué le pays au lendemain de l’indépendance que du cheminement d’une harka classique. Tout commence par la lutte entre le Palais, incarné par le roi Mohammed V et son fils le prince Moulay Hassan, et le parti de l’Istiqlal dès 1956. Chaque camp tente alors de s’accaparer le plus de légitimité basée sur la lutte anticoloniale. Dans ce jeu d’échec, la partie finit par déraper dans la région du Rif en 1958. Sous l’impulsion du jeune parti du Mouvement Populaire (MP) fondé par Abdelkrim Khatib et Mahjoubi Aherdane, la région du Rif devient le centre de la confrontation politique. Pour ce faire, le MP, adoubé par le Palais, décide d’exhumer le corps de Abbas Messadi, l’un des chefs de l’Armée de Libération Nationale de la zone nord. Très populaire dans la région de Nador, ce dernier a supposément été tué par des membres de l’Istiqal en juin 1956. L’enterrer à nouveau dans son fief rifain d’Ajdir vise à rallier les tribus rifaines contre la formation de l’Istiqlal. Si le stratagème semble fonctionner dans un premier temps, la situation dans la région devient vite explosive. Les habitants du Rif profitent de l’attention de tous le pays pour exprimer des revendications sociales et économiques. La sécheresse notamment, l’inflation et le manque de structures de développement poussent d’anciens membres de l’ALN dans la zone à encourager des manifestations qui ne visent plus seulement les représentants de l’Istiqlal, mais également ceux de l’appareil d’Etat. Suite à de violentes représailles, quelques combattants reprennent les armes. La région de Taza est proclamée zone militaire dès novembre 1958. Nouvellement constituées avec à leurs tête le jeune prince Moulay Hassan, les Forces Armées Royales (FAR) investissement massivement le Rif. Aidés par une logistique française, les soldats chargent violemment les insurgés. Encore aujourd’hui, le bilan de ce conflit demeure imprécis. Mais plusieurs centaines de Marocains des deux camps succombent. Il faut attendre juin 1959 et la tournée du roi Mohammed V pour déclarer officiellement la fin des hostilités.