La Constitution du 3 mai 1791 fête cette année ses 230 ans. Malgré la crise sanitaire, l’ambassade de Pologne au Maroc a tenu à marquer l’évènement. A Casablanca puis à Rabat, l’ambassadeur polonais Krzysztof Karwowski a, le 30 avril, rappelé à ses hôtes marocains pourquoi son pays est tellement attaché à cette date…
«Normalement, le 3 mai est un grand jour de fête dans notre pays», déclare avec une pointe d’amertume Krzysztof Karwowski, nouvel ambassadeur de Pologne au Maroc. Malgré la situation sanitaire qui ne permet pas à la grande majorité des pays du monde de célébrer leurs fêtes nationales, la diplomatie polonaise tient à rappeler combien le 3 mai est une date importante à ses yeux. C’est pourquoi, sous l’impulsion de l’ambassadeur, résident à Rabat depuis l’été dernier, un évènement a été organisé le jeudi 30 avril au consulat général de Casablanca puis à l’ambassade de la capitale du royaume. Krzysztof Karwowski, féru d’histoire, a donc, avec un enthousiasme manifeste, expliqué à ses hôtes marocains les évènements du 3 mai 1791 qui ont changé la face de son pays. En cette date, des nobles polonais proclament un document bien précoce à l’échelle du temps. Il s’agit d’une Constitution historique, la première du pays mais aussi en Europe. Dans le monde, seule celle des Etats-Unis (proclamée en 1787) la précède de quelques années. Au delà de ce record de précocité, qui reconnait à ce document le premier processus démocratique du vieux continent, la Constitution polonaise est devenue le symbole d’une nation, peut être un peu que les autres, farouchement attachée à son indépendance. «C’est un peu comme vous au Maroc», explique l’ambassadeur, qui précise sa réflexion : «En un millénaire, vous n’avez subi que 44 ans de colonisation, et cela fait de vous, un peuple fier de sa souveraineté».
Une fierté que ne cache pas Krzysztof Karwowski à l’évocation des circonstances de la proclamation du fameux document. «A l’époque, la Pologne vivait dans un régime lui aussi unique, celui de la République des Deux Nations». Une organisation originale, et là encore inédite, qui scelle, depuis 1569, un destin commun à deux entités pourtant bien distinctes, la Pologne donc et le grand-duché de Lituanie. Cette république est, malgré son nom, sous l’autorité d’un monarque, trait d’union entre les deux nations. A la fin du XVIIIe siècle, ce roi est Stanisław August Poniatowski, également l’initiateur de la Constitution. Face aux menaces des grands empires régionaux, la République des Deux Nations souhaitent confirmer sa singularité grâce à ce texte voté par les nobles du régime. Ils y consacrent, déjà, la séparation des trois pouvoirs exécutifs, judicaires et législatifs. De plus, la Constitution change le statut des paysans, libérés de la servitude et tout en consacrant le catholicisme, permet une tolérance pour les autres religions. Des valeurs et pratiques démocratiques dont la Pologne est aujourd’hui fière et font d’elle le pays le plus «europhile» de tous le continent. A la fin de son intervention, l’ambassadeur polonais fait un bond en avant dans l’histoire, pour rappeler à quel point les relations entre son pays et le Maroc, malgré la crise sanitaire ne cesse de se développer. Après les valeurs de fierté et d’indépendance, les deux pays se découvrent de plus en plus de points communs.