Siham Benchekroun a initié l’élaboration d’un ouvrage collectif, «L’Héritage des femmes», qui réunit des contributeurs provenant de nombreuses disciplines des sciences sociales et humaines, pour converger vers le traitement de ce grand sujet ô combien épineux. Zamane l’a rencontrée.
La question sur l’héritage des femmes revient régulièrement dans l’actualité. Depuis combien de temps est–elle sérieusement débattue au sein de la société marocaine ? Comment cette approche évolue-t-ellepolitiquement?
Il est vrai que la question de l’inégalité de droits à l’héritage familial entre les hommes et les femmes est récurrente. Au Maroc, cette revendication est longtemps restée assez timide, passant derrière d’autres sujets considérés prioritaires et plus urgents. Mais elle s’exprime désormais de façon plus audible. Toutefois, à mon sens, la question n’a pas encore été débattue sérieusement. Du moins si l’on entend par “débat” la notion de dialogue. Certes, des associations féminines, des militants, des intellectuels plaident depuis plusieurs années en faveur d’une réforme du code successoral, mais leur avis ne soulève encore que des “rugissements indignés” des défenseurs autoproclamés de l’islam. On se maintient toujours, en particulier sur ce sujet, dans un registre uniquement émotionnel. Et lorsque les émotions guident la raison, on ne discute pas, on n’écoute pas. Pire, dans ce cas précis, on dénigre, on accuse, on menace… Je ne me fais d’ailleurs aucune illusion sur le fait que mes propos sur l’héritage des femmes seront rejetés avant même d’être entendus par de nombreux lecteurs et auditeurs. En réalité, les conservateurs recommandent d’obéir sans réfléchir, et pour l’éternité, aux règles édictées par un système patriarcal. Un système qui reconduit des coutumes tribales où la lignée agnatique est prioritaire.
Propos recueillis par Sami Lakmahri
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