Kandicha est un être culturel schizophrénique. en effet, la belle Aicha relève à la fois de la légende historique et du monde des démons. Voyage au pays des mythes.
Tout le monde au Maroc, et même dans une bonne partie de l’Algérie, a entendu parler d’Aicha Kandicha. Mais plus on se rapproche de l’Atlantique plus le mythe est vivace dans le langage quotidien et les contes populaires. Femme séductrice et adultère, démon aux pieds de chamelle, Aicha Kandicha hante nos cauchemars d’enfants, sans qu’on sache trop pourquoi, ni comment elle s’est introduite dans notre imaginaire collectif. La première version du mythe veut qu’Aicha Kandicha soit une comtesse portugaise. Il s’agirait d’une femme noble d’origine portugaise tombée follement amoureuse d’un notable marocain de la ville de Safi. L’histoire se serait déroulée il y a quelques siècles. La femme aurait rejoint son amoureux et ils se sont mariés selon la loi coranique, d’où son prénom musulman. Comme elle n’avait pas l’habitude de se couvrir la tête et qu’elle était très belle : cheveux soyeux et très noirs, yeux noisette et visage très blanc, les hommes qui la croisaient dans les rues de la ville en tombaient tous amoureux. Certains en perdaient la raison. D’où la légende.
Dans une deuxième version, Aicha Kandicha est présentéecomme une Marocaine très belle de la région d’El Jadida. Elle jouit grosso modo des mêmes caractéristiques que la comtesse. Mais il s’agirait ici d’une résistante qui se serait juré de venger son mari tué dans un affrontement avec les Portugais qui occupent la ville. Cette Aicha nouvelle version se faisait passer pour une fille de joie. Et sa beauté aidant, elle séduisait les officiers portugais et les persuadait de la suivre la nuit dans un coin isolé. Puis ellesortait son couteau pour les égorger. Par moquerie envers sa vie dissolue, les Portugais l’aurait surnommée la Comtesse.
Par Maâti Monjib
Lire la suite de l’article dans Zamane N°3
La légende prit une dimension régionale après le débarquement de GI américains sur les côtes du Maghreb pour combattre les armées nazies envahissant l’Afrique du Nord.
Ce personnage mythique, que l’histoire situe grosso modo au niveau de la ville d’El Jadida, porte en tout cas un nom composé: moitié marocain et musulman (Aïcha), moitié portugais (Condesa, soit Comtesse). Nous, marocains qui alimentons ce mythe, avons prononcé ce deuxième composant, écrtit « Condesa » et prononcé /condécha/ en portgais, comme nous croyons l’entendre: « qandicha » (en arabe), « qandoucha » en amazigh tachelhit.