Zamane a retrouvé les archives d’un service de police espagnol chargé de traquer et empêcher les romances entre Marocains et Européennes dans les années 1940.
Durant l’époque du Protectorat espagnol (1912-1956), les relations des «indigènes», musulmans et juifs, avec des femmes européennes, et spécialement espagnoles, étaient étroitement surveillées par la police. Celle-ci était mandatée par la Direction des affaires indigènes (DAI), le département chargé de la chose marocaine. Pour contrôler les allées et venues de ces couples mixtes, leurs courriers et leurs appels téléphoniques, la police faisait appel à la «collaboration» des concierges, des opératrices téléphoniques (à l’époque pour appeler par téléphone il fallait passer par un standard) et souvent aux voisins.
Tout y passait. Leurs mœurs, bonnes ou mauvaises, leur rapport avec le nationalisme marocain et leur relation avec une puissance étrangère. Les correspondances étaient confisquées ou violées, les appels écoutés et la vie privée de ces couples mixtes décortiquée. Toutes les villes de la zone espagnole avaient un service spécifique chargé de cette besogne. Cette pratique, qui était aléatoire au début de l’occupation du Maroc, devint systématique à partir des années 1940. Le colonisateur s’est évertué à casser ces liaisons amoureuses afin qu’elles n’aboutissent pas au mariage, qu’on pouvait alors difficilement dissoudre. Il n’empêche que, comme a pu le constater Zamane durant son enquête, des mariages mixtes en bonne et due forme ont été dissous par la force, notamment en éloignant l’épouse du Maroc.
Par Adnan Sebti
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