Vendue à plus de 26 millions d’exemplaires, la Golf est l’un des plus gros succès automobiles mondiaux. C’est grâce à elle que Volkswagen s’est forgé l’image et la réputation qui font sa notoriété actuelle.
L’histoire de la Golf est étroitement liée avec la diversification même de la gamme Volkswagen. Une sorte de renaissance pour la marque créée, en 1936, par un certain Ferdinand Porsche. Durant les deux décennies qui ont suivi la Deuxième guerre mondiale, le constructeur de la Coccinelle, lui cherchant une descendance, n’a fait qu’enchaîner les flops commerciaux avec des modèles comme les type 3, type 4 et K70. Preuve qu’on ne remplace pas si aisément une voiture de légende comme la Cox. À l’aube des années 1970, Volkswagen cherche impérativement à enfanter un modèle capable de succéder à la Coccinelle, quitte à opérer une vraie rupture ou même à étudier les propositions de designers externes. C’est ainsi que naîtra la Golf, imaginée et crayonnée par un jeune styliste italien, qui deviendra un grand nom du design, Giorgetto Giugiaro.
Un succès immédiat
Fondateur de Italdesign, Giugiaro s’était d’abord illustré dans son pays natal en crayonnant des voitures sportives comme la Fiat Dino (1967) et l’Alfasud (1972). Parmi les particularités esthétiques de cette dernière, son coffre à hayon. Un élément de carrosserie qui sera reconduit dans le projet Golf, dont la première maquette, présentée en 1970, a immédiatement reçu l’aval des dirigeants de la marque allemande. Sa gestation prendra quelques années et, en mars 1974, la mouture définitive est enfin présentée au grand public. Petite, mais fonctionnelle et plutôt originale par ses lignes carrées, la première Golf trouve très vite sa place sur le marché lorsqu’elle est commercialisée en mai de la même année. Très vite, car elle se hisse aussitôt en tête des ventes en Allemagne et atteint même le million d’unités vendues en octobre 1976, soit tout juste deux ans après son lancement. C’est cette même année que sortiront deux Golf à marquer d’une pierre blanche dans cette saga : la première version diesel et surtout la Golf GTI (Grand Tourisme Injection). Forte du succès fulgurant de sa petite auto, la firme de Wolfsburg prospère en pleine crise pétrolière. En 1978, la Golf s’exporte vers les Etats-Unis dans une version conforme à ce marché et rebaptisée « Rabbit ». L’année suivante, elle tombe le haut et gagne en popularité avec sa variante cabriolet. La Golf démarre les années 1980 avec une réussite insoupçonnée, tout en continuant à innover. Ainsi, la première version GTD (Turbo Diesel) est lancée en 1982, année où la Golf cumule 5 millions d’exemplaires vendus dans le monde. L’heure de son remplacement a sonné. La deuxième génération de la Golf arrive à l’automne 1983. Cette fois, son design a été réalisé en interne et voulu plus consensuel. Si bien qu’elle apparaît comme une évolution de la première génération.
Signes extérieurs de bourgeoisie
On ne change pas – trop – une formule qui gagne. Allongée de seize centimètres, elle est plus habitable et a également gagné en confort comme en qualité perçue. Un « embourgeoisement » bienvenu pour certains, mais mal vu par les fans de l’ancienne Golf, surtout ceux qui n’ont d’yeux que pour la sportive GTI. Un logo que la seconde Golf s’appropriera dès 1984, avec sous le capot un bloc encore plus puissant, en l’occurrence, le 1800 cm3 qui ne développe que 112 chevaux, soit 2 de plus que le 1,6 litre de l’ancienne GTI. Pour calmer les puristes, il faudra attendre l’été 1985, date à laquelle débarque la version GTI 16 S qui, elle, compte 139 ch. Les années qui suivent voient arriver d’énièmes déclinaisons de la Golf, comme les versions Synchro, G60 et Country, qui ont toutes les trois pour dénominateur commun une transmission intégrale. Entre-temps, la famille Volkswagen s’est largement élargie avec l’arrivée des premières Polo, Jetta, Scirocco et Passat. Mais c’est bien la Golf II qui constitue toujours le modèle cœur de gamme et l’essentiel des ventes. Après le cap des 7 millions d’exemplaires atteint en mars 1985, la dix-millionième Golf est produite en juin 1988. Du coup, et à l’aube des années 1990, la Golf est déjà la plus vendue de son segment.
Golf III, la plus marquante
Dévoilée durant l’été 1991, la troisième génération de la Golf évolue doucement, mais remarquablement par rapport à sa devancière. Elle n’a que peu grandi, mais ses lignes et atours se sont fortement arrondis. Soigneusement présenté, son habitacle est aussi bien protégé en cas d’accident, qu’insonorisé du fait d’un bon coefficient aérodynamique pour l’époque (Cx 0,31). Mécaniquement, l’écart avec la concurrence avait bien été creusé. D’abord en étrennant la technologie TDI (Turbo Diesel à Injection Directe). Ensuite, et surtout, en étant la première Golf à s’armer d’un moteur six cylindres (VR6). Le tout parachevé par de bonnes prestations routières. Voilà comment elle a conquis les journalistes spécialisés qui constituent le jury international de la «Voiture de l’année», trophée qu’elle a remporté pour l’année 1992. En mai 1994, la quinze-millionième Golf est produite et sa bouillonnante version GTI, qui a fêté ses 20 printemps en 1996, est devenue un « must have » pour les jeunes en quête de petites sportives accessibles. C’est donc cette troisième génération qui a définitivement installé l’image de la Golf comme référence de sa catégorie, surtout en termes de robustesse et de fiabilité, tout en perpétuant son succès commercial. Cela, malgré le fait qu’elle n’avait pas dépassé les 4,8 millions d’unités au compteur (entre 1991 et 1997), soit bien moins que les 6 millions réalisés par chacune des deux précédentes Golf.
Face à la concurrence
En fait, les Golf de ces 20 dernières années n’ont jamais pu égaler les performances commerciales de deux premières générations. Et pour cause. Initiatrice du genre, la compacte allemande s’est fait rejoindre par une concurrence qui s’était activement mise au travail. Pourtant, lorsqu’elle est lancée en 1997, la Golf IV fait sensation. Poste de conduite high-tech, carrosserie lisse et galvanisée, puissants moteurs TDI (de 90 à 150 ch) et ESP de série… Plus qu’un nouveau sursaut qualitatif, cette Golf est techniquement très aboutie, surtout dans ses variantes sportives comme la V6 4Motion (204 ch) et la version R32 mue par un V6 3,2 l de 241 ch. Écoulée à 4,3 millions d’unités, cette quatrième génération cède sa place à la cinquième Golf qui roule encore massivement sur les routes depuis 2003. La ligne générale évolue sensiblement, mais conserve les fondamentaux qui ont fait le succès des anciennes Golf. Là encore, la montée en gamme se poursuit avec une belle finition intérieure, des blocs TDI très affûtés et un confort routier difficile à critiquer, et ce, du fait de l’adoption des suspensions arrière du monospace Touran.
En 2006, Volkswagen fête le 30e anniversaire de la Golf GTI, une sportive dont l’image est sur le déclin au grand désespoir de ses amoureux. Toujours durant cette même année, enjeux écologiques obligent, la Golf prend une autre voie avec les motorisations TSI axées sur le downsizing, soit l’augmentation du rendement (forte puissance/faible conso) tout en réduisant la cylindrée. En mars 2007, la vingt-cinq-millionième Golf est produite, surpassant de loin la Coccinelle. Mais au total, cette cinquième Golf n’aura séduit «que» 2,6 millions d’acheteurs dans le monde, en raison d’une concurrence de plus en plus talentueuse.
Plus proche de nous dans le temps, l’actuelle et sixième génération de la Golf entre en service vers la fin 2008. Plus racée par son design plus anguleux, elle continue à cultiver l’esprit de la Golf, celui d’une compacte moderne, fiable et attractive qui, non seulement constitue une valeur sûre et élevée à la revente, mais s’est définitivement installée comme la reine de sa catégorie. Voiture la plus vendue en Europe depuis 2009, la Golf VI peut aussi se targuer de quelques distinctions majeures, dont celle de «Voiture mondiale de l’année » 2009. Depuis 1974, les six générations de Golf ont tour à tour façonné l’image et le mythe d’une compacte devenue leader historique de sa cour et symbole de la qualité «made in Germany», avec à la clé plus de 26 millions d’exemplaires diffusés dans le monde. Et, comme on dit, la saga continue…
Par Alain Delaroche