L‘histoire du Maroc est plus longue et extraordinaire qu’on ne le pense généralement. Elle démarre bien avant l’arrivée de l’islamet de l’arabité, même si cette arrivée lui a donné un coup de fouet, en l’inscrivant dans un contexte plus large. Bien sûr, cette histoire n’est pas toujours bien documentée. Elle comprend des « trous » et des points de suspension que les historiens n’ont pas fini de combler… Avec le « collector » que vous tenez entre les mains, Zamane vous invite à revisiter cette histoire à travers celle de ses rois et « reines ». Oui, vous avez bien lu. Même si le titre de « reine » n’a officiellement jamais existé au Maroc, certaines femmes ont réellement exercé cette fonction, pesant et intervenant directement dans les affaires de l’Etat. Parfois, elles ont même pris les armes : cas de la princesse almoravide Fannou. Elles étaient donc princesses de sang, épouses ou mères de rois : cas de la célèbre Khenata bent Bekkar, dont le « règne » s’étala de Moulay Ismail à son petit-fils, Sidi Mohammed ben Abdallah, plus connu par Mohammed III. D’autres, encore, ont exercé un pouvoir local ou régional (Sitt ou Sayyida al-Hurra, entre Chefchaouen et Tétouan), quand elles ne se sont pas retrouvées « reines » malgré elles, dans des circonstances hors-du-commun (le cas de l’énigmatique «reine» Virginie Lanternier).
À côté de ces femmes, qui ont souvent marqué de leur empreinte l’histoire marocaine, il y a aussi, bien entendu, des hommes. Ils ont porté le titre de sultans, rois, voire califes, émirs ou princes. Ibn Toumert, quant à lui, n’a porté aucun de ces titres, mais fut seulement imam : et pas n’importe lequel, puisque c’est lui qui théorisé le pouvoir almohade et permis son avènement, devenant ainsi le « parrain » de la plus grande et puissante dynastie de l’histoire du Maroc et de l’Afrique du nord.
Derrières les incontournables, comme Abdelmoumen, Ahmad al-Mansour, Moulay Ismaïl, Mohammed III et, plus près de nous, Mohammed V et Hassan II, dont la présence ici ne souffre d’aucune contestation, tant leur rôle et leur empreinte sont majeurs, nous avons choisi de retenir des rois ou sultans qui n’ont jamais fait l’unanimité parmi les historiens. Cas de Moulay Slimane et surtout Moulay Abdelaziz.
Ce choix peut surprendre. Mais, à l’examen, il parait tout à fait justifié. Outre la baraka qui l’a protégé contre diverses tentatives de destitution, Moulay Slimane, qui a hérité d’une situation politique très critique dans un Maroc en transition en le XVIIIème et le XIXème siècle, et qui a pratiquement plongé le pays dans une situation d’autarcie, le sultan alaouite a malgré tout su mener sa barque, contenant les appétits des puissances étrangères et entreprenant une série de réformes, notamment dans le domaine religieux.
Quant à Moulay Abdelaziz, il était avant tout la victime de son époque, de son entourage direct et d’une communication défaillante. Si la postérité a surtout retenu ses lubies, le figeant dans l’image caricaturale d’un sultan indolent, dépensier et dépassé par les événements, il ne faut pas oublier qu’il a tenté certaines réformes administratives. Et qu’il s’est montré ouvert à la modernité qui frappait à la porte de la société marocaine, ce qui n’était ni sans risque, ni sans mérite…
Karim Boukhari
Directeur de la rédaction