Assassiné en 1956 à Fès, Abbas Messaâdi est exhumé par les leaders du mouvement populaire, qui enterrent à nouveau ses restes à Ajdir, en plein Rif. C’est l’étincelle qui met le feu aux poudres en octobre 1958.
Nous sommes au milieu de l’automne 1958. Il fait encore très chaud à Fès. Le gouverneur de la ville, El Ghali Iraki, est sur les nerfs depuis plusieurs jours. Pourtant c’est un homme qui en a vu d’autres. Il a occupé en 1955 le poste à hauts risques de secrétaire général de l’état-major de l’Armée de libération (AL). Il s’est occupé, entre autres, de chercher des armes en Italie et il s’en est plutôt bien sorti malgré le fait que les services secrets français étaient à ses trousses. Ce n’est donc pas un homme facilement impressionnable. Pourtant, devenant l’objet de pressions contradictoires, il ne sait plus où donner de la tête. Son ancien camarade d’armes Abdelkrim Khatib, accompagné de Mahjoubi Aherdane, vient l’informer de sa décision d’exhumer les restes de Abbas Messaâdi assassiné et enterré à Fès en 1956. Les leaders du Mouvement populaire (MP) naissant sont décidés à faire de l’affaire Messaâdi une véritable «chemise de Othmane».
De fait, le roi Mohammed V et le ministère de l’Intérieur s’opposent officiellement au déterrement de la dépouille de l’ancien chef de l’AL de la zone Nador, mais le directeur de la Sécurité nationale, Mohamed Laghzaoui, semble prendre la position contraire. Finalement, le gouverneur donne la ferme instruction aux forces de l’ordre de former une ceinture de sécurité autour du cimetière afin d’empêcher l’exhumation des restes de Messaâdi. Mais en pleine nuit, lesdites forces – quelques centaines d’hommes – se retirent pour laisser les leaders du MP accomplir leur plan. Comment expliquer de telles contradictions au sein du régime ? Comment finiront-elles par mettre le feu aux poudres dans le Rif ? Le contexte politique y est pour beaucoup. De fait, depuis six mois environ, le Parti de l’Istiqlal domine numériquement le gouvernement et tente tant bien que mal de rogner sur les prérogatives traditionnelles du roi.
Par Maâti Monjib
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