Près d’un an après la Marche Verte, le «guide» de la révolution libyenne tente de justifier son hostilité à l’égard du Maroc et de son retour au Sahara. Dans ce texte, Kadhafi s’adresse directement à Hassan II et lui rappelle sa vision du conflit. En maniant le sarcasme et l’ironie, le chef de l’Etat libyen incarne mieux que jamais le rôle qu’il s’est octroyé de champion de la décolonisation et de père du panarabisme. Naturellement, la CIA n’en perd pas une miette… Ci-après, donc, un câble de Kadhafi à Hassan II intercepté par les Américains, issu des documents déclassifiés par la CIA:
« Février 1976,
Mon frère le roi Hassan II,
Je me permets de vous envoyer ce câble à l’heure où il me semble nécessaire de le faire…
Le 11 juin 1972, j’ai exprimé lors de mon discours que la République Arabe de Libye prendrait ses responsabilités dans le soutien du peuple sahraoui jusqu’au retrait de l’occupation coloniale espagnole de la région. A cette époque, personne ne m’a reproché une ingérence dans les affaires marocaines. Je n’ai d’ailleurs pas évoqué le cas de Sebta et Melilia, à cette date toujours sous occupation espagnole, car ce sujet concerne la souveraineté nationale du Maroc.
Au début de l’année 1973, la guerre de libération au Sahara occidental devient une réalité. La RAL (République Arabe de Libye ) a alors accompli son devoir national en fournissant le Front et en ouvrant un bureau dédié à Tripoli. Il vaut le coup de signaler que les pays concernés aujourd’hui par cette situation n’ont alors d’aucune façon coopéré avec le Front. Bien au contraire, une importante quantité d’armes en provenance de la RAL ont été confisqué par ces mêmes pays.
Dorénavant, en 1975, vous êtes devenu une partie proéminente du problème. Je vous avait proposé, à travers vos envoyés, de mettre à votre disposition les capacités militaires de la RAL dans le cas où vous décidiez de libérer Assaguia Al Hamra du colonialisme.
Mais ce qui est arrivé est que vos forces ont simplement fait une opération de transfert.
J’avais déclaré, avant cela, que je ne m’opposerais pas au Maroc si j’étais persuadé que le peuple du Sahara, mené par le Front Populaire, souhaitait rejoindre le Maroc. J’aurais alors remercié Dieu de ce dénouement, de la fin de l’implication de la RAL dans ce conflit et de la libération d’une terre arabe du colonialisme. Pourtant, Dieu sait combien j’ai essayé de convaincre les dirigeants du Front de vous rejoindre après l’indépendance ».