Du califat de Damas au califat de Cordoue, les Omeyyades ont traversé le temps et l’espace pour prouver à la postérité que les empires sont parfois plus vivaces qu’on ne le pense. Histoire d’un âge d’or.
Le califat omeyyade, qui est à l’origine de la conquête de la péninsule ibérique, règne sur le monde arabo-musulman depuis moins d’un siècle quand, en 750, un membre du clan des Hachémites les détrône, extermine toute la famille et transfère sa capitale à Bagdad en donnant à cette nouvelle dynastie le nom de Abbassides. Est-ce la fin de l’histoire omeyyade ? Non. Un jeune homme de 20 ans, né en 730, un certain Abderrahmane, parvient à échapper à ce massacre et se réfugie dans la lointaine province d’Al-Andalus, où il peut compter sur de nombreux partisans. Al-Andalus est alors au bord de la guerre civile. A plus de 5000 kilomètres de leur base arrière, l’actuelle Arabie Saoudite, les tribus arabes ont reproduit les mêmes rivalités que sur la terre de leurs ancêtres et s’affrontent sans merci. Aux tribus arabes, il faut ajouter d’autres clans, notamment les Berbères et les Syriens, qui ont massivement participé à la conquête d’Al-Andalus. Pour compliquer le tout, d’importantes minorités complètent cette mosaïque de populations : les Muladies, chrétiens fraîchement islamisés, et les Mozarabes, habitants de la péninsule qui ont préféré garder leur foi. Après avoir traversé l’Afrique du nord avec son fidèle Badr et jaugé la situation locale, qui ne lui est pas favorable, Abderrahmane arrive à Sebta en 755. De là, il envoie des émissaires dans l’actuelle province de Grenade, où résident plusieurs factions descendantes des Omeyyades. De combats en combats, il expulse les suiveurs des Abbassides, menés par un potentat local du nom de Youssef El Fihri, jusqu’à son entrée triomphale à Cordoue en 756. Mais il ne s’arrête pas là. Abderrahmane s’érige en médiateur de toutes les communautés, en veillant à éliminer les plus radicaux.
La seconde vie des Omeyyades
Les Omeyyades, battus et exterminés dans la lointaine Arabie, reprennent le pouvoir de l’autre côté du monde civilisé. Le nouveau règne de cette dynastie vaincue aurait pourtant été de courte durée si le désormais Abderrahmane Ier n’avait pas élaboré un plan pour éviter un choc frontal avec le califat de Bagdad. Il accepte ainsi de reconnaître le calife des Abbassides comme chef spirituel des musulmans, mais pas comme suzerain de la nouvelle entité. Et s’il permet que, dans les mosquées d’Al-Andalus, on continue d’invoquer le nom de l’odieux calife qui a tué les siens, pour le reste, pour le pouvoir réel, il ne cède pas une once d’autorité.
Par Adnan Sebti
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