Quand les Arabes ont fondé Al-Andalus, beaucoup de chrétiens de l’actuelle Espagne se sont convertis à l’islam, la religion du plus fort. Certains, pourtant, n’ont pas renoncé à leurs croyances religieuses : ce sont les Mozarabes.
En 711, quand les Arabes envahissent la péninsule ibérique, ils trouvent un pays uni par la monarchie visigothe qui gouverne une population d’origine hispano-romaine, de religion catholique, et dont la langue officielle est le latin. Cette monarchie, décadente, ne parvient pas à résister à la poussée des forces arabes appuyées par des Berbères d’Afrique du Nord qui, en seulement trois ans, ont réussi à occuper pratiquement toute la péninsule.
Pour ne pas s’aliéner la population locale, les Arabes offrent le choix aux vaincus : se convertir à l’islam ou garder leur ancienne religion. En insistant toutefois sur le fait qu’embrasser l’islamferait des convertis les égaux du reste de la population musulmane. Ainsi, les convertis ne sont-ils pas obligés de payer des impôts supplémentaires, peuvent garder leurs propriétés et prétendre occuper des charges publiques s’ils apprennent l’arabe.
En revanche, ceux qui veulent rester chrétiens sont soumis à une capitation (la jizya, dont la définition est « l’impôt par tête ») et à d’autres tributs sur leurs terres et biens. Ces chrétiens gardent toutefois certains droits civils et politiques issus de la législation visigothe, ainsi qu’une espèce de gouvernement autonome. Les conquérants font en sorte que le Liber Iudiciorum, ou Code Recceswinth, un corpus législatif du royaume visigoth, élaboré sous le règne du roi Recceswinth, continue de s’appliquer à eux.
Arabisés mais non islamisés
Dans les villes chrétiennes importantes, il existe un «comte des chrétiens» qui exerce, avec l’aide de fonctionnaires chrétiens, l’autorité suprême. Avec le temps, ces fonctionnaires reçoivent des noms arabes qui spécifient leurs charges. Il y a l’alcadi (maire-juge), l’alguacil (chef de police), l’almoxarife (intendant des impôts), l’almotacen ou alamin (chargé des poids et mesures), l’alarife (architecte ou expert maçon), etc. Avec le temps, les Arabes appellent cette population chrétienne, restée fidèle à sa religion, des nasranis (nazaréens), roumis (romains) et moxriques (polythéistes). Généralement, ils les considèrent comme des dhimmis ou ahl al dhimma, des gens qui, par leur condition de tributaires, sont placés sous la protection de l’autorité musulmane.
Par Adnan Sebti
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