La plupart des guerriers partis intégrer la Péninsule ibérique dans le giron de l’islam n’auraient guère su réciter le Coran, et pour cause ! Romanisés, chrétiens, ils parlaient latin ou berbère.
Voilà exactement 1300 ans, les troupes du général Moussa Ibn Noussaïr et de son lieutenant Tarik Ibn Ziyad mettaient en déroute l’armée du roi visigoth de Tolède, Rodéric, lors de la bataille dite du rio Guadalete. Il s’agit d’un événement historique de premier plan pour la Péninsule -et peut-être même pour toute la rive nord du détroit de Gilbraltar- depuis l’invention de la mémoire écrite. Ce n’est pas un simple fait militaire, ni une conquête de plus, mais bien un authentique et profond changement de cycle. Si la péninsule ibérique a connu, tout au long de son histoire, une alternance d’étapes culturelles, selon que dominaient les influences d’Europe ou bien celles venues d’Orient par terre ou par mer, il ne fait aucun doute que la conquête arabe/musulmane a été la dernière grande oscillation de pendule qui a aligné l’extrême Sud-Ouest du continent européen avec l’Orient. Le mythe va dépasser et parfois occulter la réalité historique, d’autant que celle-ci est loin d’être bien connue. Les documents décrivant ces faits lointains, rédigés des années après, sont rares et manquent d’exactitude. La littérature romantique des deux rives a fait le reste… Ainsi l’historiographie espagnole, largement nationaliste, a interprété la conquête arabe comme un accident -très long accident !- qui aurait interrompu le développement de la société romano-chrétienne ibérique et l’aurait différencié des autres régions d’Europe. Certains penseurs ont décrit cette conquête comme un grand malheur et entretenu pendant des siècles le mythe de la « reconquête » (Reconquista), de la lente récupération d’un territoire soi-disant perdu par les aïeux. Pour eux, l’Espagne et le Portugal seraient, historiquement, l’antithèse d’Al-Andalus. Il n’aurait jamais existé d’hispano-musulmans, ni d’Arabes espagnols. Pas de Portugal ni d’Espagne islamique. Tout ce qui est espagnol ou portugais ne saurait être andalou !
Par Fernando Valdés Fernández
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