La convention «d’occupation des travailleurs marocains» signée entre le Maroc et la Belgique fête ses 60 ans. À l’époque, pour les deux royaumes, les enjeux sont différents. Alors que Bruxelles cherche une main d’œuvre peu coûteuse dans son énorme chantier de reconstruction post-guerre mondiale, le Maroc y voit une opportunité de résorber le chômage dans un contexte de vaches maigres après l’indépendance.
Après la Seconde guerre mondiale, l’Europe doit se reconstruire. Les pays de la façade occidentale du continent, particulièrement ceux du Benelux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg) font massivement appel aux travailleurs étrangers. Pour Bruxelles, il est essentiel de gagner la «bataille du charbon». La reconstruction nationale après les horreurs de la guerre, exige une production charbonnière importante. Les pouvoirs publics désirent que cette production soit bon marché, afin de fournir aux entreprises de transformation une énergie qui ne fasse pas monter les prix. L’accroissement de la production charbonnière ne peut toutefois se faire sans un recrutement massif de mineurs de fond. Les autorités belges cherchent en priorité à recruter des mineurs belges. «Mais les vocations sont rares: personne ne se sent très attiré par la mine. Dès lors, on engage force main d’œuvre étrangère. Dans un premier temps on a recours à une main-d’œuvre occasionnelle composée de collaborateurs, de prisonniers allemands et de personnes déplacées d’abord. Ensuite ce fut l’embauche massive d’ouvriers étrangers peu préparés à cette tâche, en premier lieu des Italiens», explique Anne-Frenet De Keyser, historienne belge spécialiste de l’immigration.
Dès 1955, le gouvernement français se dit prêt à envoyer dans les charbonnages belges des travailleurs nord-africains n’ayant pas encore séjourné en France. Paris se dit même prête à intier les travailleurs issus de ses colonies en Afrique du Nord aux métiers de la mine. Pour la France, l’enjeu est double : «Résorber ainsi un chômage endémique et de se débarrasser d’une main-d’œuvre turbulente», note De Keyser.
Par Omar Kabbadj
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