Le projet fou de relier les deux rives les plus rapprochées de la Méditerranée est pensé dès le XIXème siècle. Naturellement, c’est vers le détroit de Gibraltar que les regards des ingénieurs sont braqués. L’époque, marquée par un développement technologique exponentielle, se prête aux idées les plus ambitieuses. Ce sont d’abord les Français qui se penchent sérieusement sur la possibilité de creuser un tunnel ou de construire un pont. Face à la difficulté de la tâche, les ingénieurs français renoncent. Bien qu’en déclin certain, l’empire espagnol ne renonce toujours pas à unifier ses possessions nord africaines avec la péninsule ibérique. En 1905, Madrid se penche sur les travaux de Garcia Fara, un officier ingénieur qui propose l’installation de tubes en acier immergés entre Tanger et l’Espagne. Ses travaux sont présentés dans le cadre de la Conférence d’Algésiras en avril 1906. Le projet est à l’époque en parfaite adéquation avec l’objet du sommet international, c’est-à-dire se partager le «gâteau Maroc» et permettre une optimisation de l’exploitation de ses ressources. Deux années plus tard, une nouvelle étude menée par un certain Carlos Ibanez de Ibero vient approfondir la réalité géologique du Détroit. Ce dernier propose un double tunnel ferroviaire, mais il parvient surtout à localiser le passage supposé le moins profond. Pour autant, il faut attendre les années 1920 pour assister aux premiers travaux de percement, réalisés de chaque côté de la Méditerranée. Le lieutenant Pedro Jenevois, ingénieur espagnol reconnu, profite de l’entente entre Français et Espagnols pour accélérer les recherches de faisabilité. A Tanger et à Tarifa, Jenevois creuse les premières excavations de 400 mètres de profondeur. Il est probablement le premier à constater que sans études géologiques précises, il est quasi impossible d’avancer davantage dans la réalisation du tunnel. Il explique dans ses notes de 1926 : «À notre avis, il existe une impossibilité matérielle de présenter un projet pour un tunnel sous le détroit de Gibraltar qui n’est autre que théorique. […] Sans une étude géologique exhaustive, il est impossible même de se prononcer sur le point de départ exact ou de la bouche du tunnel». Les ardeurs se refroidissent. La réalisation d’un tel projet est encore techniquement infaisable. Et aujourd’hui encore, c’est toujours le cas.
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