Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’arrivée du train au Maroc ne s’est pas faite du jour au lendemain. À elle seule, la guéguerre entre les puissances européennes a retardé les échéances et rendu la réalisation longue, périlleuse. Et partielle, surtout.
Une fois achevé, le réseau ferroviaire du Maroc allait être considéré au nombre des réalisations remarquées du protectorat français. En ces années 1920, selon divers écrivains et visiteurs surtout européens, l’aspect clair et souvent coquet des premières gares frappait déjà les voyageurs privilégiés de cette période. Ils pouvaient même apprécier, par ailleurs, le confort de certains wagons de première classe et, ultérieurement, l’agrément causé par la traction électrique sur la plupart des parcours. Au départ, il y eut un réseau exclusivement destiné aux besoins de l’occupation militaire, les lignes commerciales interviendront plus tard. La ligne Tanger-Fès a marqué alors les esprits de cette époque et pour plusieurs générations, constituant une transformation fondamentale dans les possibilités de déplacement des personnes et de transport des marchandises en des délais incroyablement courts, permettant progressivement d’éviter des trajets fatigants à dos de mules pour les nantis, ou d’ânes pour les démunis quand ce n’était pas à pied tout simplement. Il y eut techniquement, en fait, deux réseaux ferroviaires successifs qui seront installés durant le protectorat. Le premier fut constitué de voies de 60 centimètres d’écartement avec quelque 2.000 kilomètres de lignes, à usage purement militaire. La substitution du réseau normal à l’ancien a pris une dizaine d’années, et avec la voie à petit écartement allait disparaître un des vestiges parlants de la pénétration militaire française et une des méthodes privilégiées pour la «pacification» menée par Lyautey.
Par Mohammed Germouni
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