La défaite des Marocains contre les Espagnols, dans la tristement célèbre Guerre de Tétouan, annonçait un grand revirement dans l’histoire du royaume chérifien. Une seconde «chute de Grenade», diraient certains. Retour sur les grands moments d’une guerre qui scellera définitivement le sort du pays pour les années qui suivront.
Rien n’a autant marqué le Maroc du XIXème siècle que la défaite de 1860 face à l’Espagne, dans la guerre dite de Tétouan. Il est vrai que celle-ci venait après la bataille d’Isly en 1844 contre la France, mais la portée de la Guerre de Tétouan fut plus grande. À Isly, le Maroc perdit dans une bataille qui dura une journée contre une nation qui brandissait la force pour avoir la paix dans ce qu’elle considérait son espace vital, l’Algérie. Elle n’imposa pas de réparations de guerre et même si elle opéra des ponctions sur le territoire marocain, elle s’empressa de signer un traité de délimitation des frontières, le fameux traité de Lalla Maghnia en 1845 et fit du sultan du Maroc un «ami». Avec l’Espagne, c’était les relents des Croisades, les velléités d’expansion territoriale, de fierté nationale d’une nation déchirée par une guerre civile en butte à des querelles intestines de politique interne, le tout greffé sur la perte des colonies en Amérique latine comme en Asie, où l’Espagne avait perdu les Philippines (qui doivent leur nom au Roi Felipe d’Espagne) et les Caraïbes. Qu’est-ce qui empêcherait l’Espagne de faire au Maroc ce que la France avait fait en Algérie ?
Alarcon, un stratège de l’époque, disait que l’histoire montre ce que la géographie commande : la grandeur va avec la maîtrise des deux rives du détroit de Gibralatar, depuis les Romains, en passant par les Almoravides ou les Almohades. L’Espagne, si elle veut être au rendez-vous de la grandeur, doit commander les deux rives du détroit. Pour le Maroc, comme le dira l’historiographe Ahmed al-Nassiri, ce fut l’événement qui entama son prestige et le remit, poings et mains liés, aux puissances européennes par le phénomène des capitulations, l’antichambre de la domination.
Par Hassan Aourid
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