Au Maroc, politique et religion sont indissociables, et les Oulémas existent pour guider l’action politique du sultan, Amir Al Mouminine. Les autorités religieuses sont même habilitées à proclamer les sultans tout en exerçant un contrôle strict dans la gestion de la chose publique en général. Rien de plus illusoire, nous dit Ibn Khaldun, car dans la pratique le rôle de ces respectables messieurs se limite à cautionner des choix déjà pris par les vrais décideurs, c’est-à-dire ceux qui jouissent d’une ‘assabiyya’, ou ceux qu’on pourrait appeler aujourd’hui les détenteurs de la force de coercition. Or, affirme le célèbre historien, les oulémas ne jouissent d’aucune ‘asabiyya’, donc d’aucun pouvoir réel. Comment peuvent-ils dans ce cas décider du sort politique de la oumma et prétendre constituer la crème de ce qu’on appelle les ‘ahl al hall wa al ‘aqd (ceux qui lient et délient la chose publique) ? Au-delà de la théorie, les exemples concrets de conflits entre monarques et oulémas ne manquent pas. L’exemple le plus célèbre de l’Histoire du Maroc implique le sultan Moulay Ismaïl et le célèbre Fqih El Youssi (1672-1727). Le litige entre les deux personnages concerne la décision du sultan de créer un corps d’armée professionnelle uniquement composée d’esclaves noirs. Une bataille que Moulay Ismaïl finit par emporter. Bien plus tard, au XXème siècle, Hassan II va définitivement mettre un terme aux potentielles prérogatives politiques des Oulémas. En consacrant institutionnellement le ministère des Awqaf et des Affaires islamiques en 1963, le monarque place les autorités religieuses sous la coupe de l’Etat. Depuis, leur nouveau statut de fonctionnaires les rendent encore plus inoffensifs.
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