La Guerre du Rif n’est qu’un lointain souvenir, Abdelkrim, héros du Nord, est défait et exilé. Pourtant les Aït Ouriaghel, tribu réputée pour ses actes de rébellions, continuent de conspirer et rêvent de bouter l’ennemi ibérique hors de ses terres.
Il aura suffi de treize pages. Treize pages seulement pour transformer une banale journée de printemps dans le petit bourg d’Ajdir, en une date à marquer d’une pierre blanche. En ce 26 mai 1951, le contrôleur du district, qui a brièvement été la capitale de l’éphémère République du Rif de Mohammed ben Abdelkrim El Khattabi, apprend une nouvelle qui le plonge dans une fébrilité sans pareille. Il consigne ces informations dans les moindres détails et la plus grande discrétion, dans un rapport frappé du sceau du secret. Les treize pages du document mystérieux seront par la suite envoyées au contrôleur régional d’Al Hoceima, qui à son tour a jugé l’affaire si grave et compromettante, qu’il a estimé bon de rédiger un nouveau rapport fictif, avant de le communiquer à la Direction des affaires indigènes (DAI) du Haut commissariat espagnol à Tétouan. L’affaire n’a jamais été rendue publique. Même à la signature du Manifeste de l’Indépendance, les autorités ont mis un point d’honneur à enterrer cette histoire et placer sous scellés tous les documents préjudiciables, avant de les expédier en Espagne. Ce ne sera que soixante ans plus tard que le rapport secret sera exhumé, retrouvé presque par hasard dans un fonds d’archives poussiéreuses de l’administration coloniale espagnole, dans les environs de Madrid. Mais qu’y avait-il de si sensible dans ces documents pour justifier autant d’hermétisme ?
Par Adnan Sebti
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