Le XIème siècle est celui des «peuples nouveaux», selon la formule d’Ibn Khaldoun. Des dynasties bâtisseuses d’empires émergent un peu partout à la conquête de territoires nouveaux ou de villes qu’ils vont métamorphoser. Les Turkmènes prennent Baghdad (1055), les Normands prennent la Sicile (1060) et les Almoravides prennent Marrakech (1062). C’est cette prise d’une future cité impériale que Zamane va vous narrer au fil de ces lignes.
Avant que les Almoravides investissent le site de la future Marrakech, dans leur épique progression vers le centre du Maroc, s’ils ne conquièrent pas des cités sur leur parcours, ils en créent. Marrakech, la ville rouge, fait indubitablement partie du récit fondateur des Almoravides, «qui est un calque des origines de l’Islam», selon les mots de l’historien Gabriel Martinez-Gros. Depuis les confins du Sahel où ils ont entamé leurs prédications, les Almoravides vont remonter vers le Nord du Maghreb al-Aqsa. Cette voie qu’ils empruntent est désigné sous le nom de «triq lemtoumi» car l’autre appellation des Almoravides est bien celle des Lemtouma (ou «al-Moulattamoun», les voilés). Du nom du voile que les hommes du désert portent pour se protéger des vigoureuses tempêtes de sables. Ce triq lemtoumi est l’une des principales pistes caravanières entre l’Ouest du Maghreb et l’Afrique subsaharienne qui aboutit à Marrakech. Ce faisant, la progression vers la ville ocre n’est pas une promenade de santé. Tout du contraire. Au Tafilalet, la population se soulève. Leur garnison à Sijilmassa est passée au fil de l’épée. Il a fallu en venir à bout. Ensuite, ils mènent la Guerre Sainte dans le Tadla contre les Zenata. Ben Yassine, leur mentor religieux, est tué en 1059 par les Berghouatas. En 1061, c’est Youssef ben Tachfine, ancien lieutenant d’Aboubakr ben Omar, qui reprend le flambeau. Marrakech n’est encore qu’un mirage bien lointain qui reste à devenir réalité. Allons un peu en avant dans le détail. Aussi saugrenu que cela puisse paraître, l’idée de Marrakech voit le jour dans la ville d’Aghmat-Ourika.
Par Farid Bahri
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