La migration portugaise vers le Maroc est nettement moins racontée que les mouvements migratoires portugais vers d’autres pays. Pourtant, ce phénomène semble avoir été particulièrement fort au cours des premières décennies du XXème siècle, lorsqu’il a mobilisé les familles de pêcheurs de l’Algarve.
Qu’il s’agisse du Brésil, des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de l’Angola ou du Mozambique, les Portugais ont pris l’habitude de faire leurs valises et de partir, principalement pour tenter d’échapper à la pauvreté et au manque d’opportunités. Mais aussi pour fuir l’oppression politique pendant la longue période de dictature qu’a connu le pays entre 1933 et 1974. Curieusement, il est peu connu que l’émigration portugaise vers le Maroc a existé et existe toujours. «Encore peu de gens savent que ce sont les pêcheurs de l’Algarve qui ont alimenté ce mouvement, qui a atteint son apogée au début du XXème siècle», précise Patrícia Menezes Moreira, chercheure en études africaines à l’Université de Porto, dans « Marrocos, destino improvável para a emigração portugues » (Maroc, destination improbable de l’immigration portugaise), publié en 2020.
«Il est vrai que ce pays n’est pas associé à une certaine image de prospérité économique, elle-même basée sur des normes spécifiques de ce que l’on peut entendre par développement. Mais il est également vrai que certains y ont vu de bonnes opportunités», ajoute-t-elle.
L’immigration de Portugais originaires de la région aujourd’hui touristique de l’Algarve – Al Gharb, autrefois province de l’Andalousie arabe – a atteint son apogée après la première guerre mondiale, lorsque des centres de conserverie de thon ont été installés sur la côte marocaine. «Cela a déclenché d’importants flux de personnes attirées par le niveau de rémunération et la possibilité de gagner de l’argent. La campagne durait de 100 à 120 jours, offrant ainsi une certaine continuité aux salariés», note Moreira. Le phénomène était tel que, au début du XXème siècle, la présence portugaise au Maroc était tout à fait significative, avec des milliers de personnes qui y vivaient.
Par Omar Kabbadj
Lire la suite de l’article dans Zamane N°167