Une étoile de mer, chaînon manquant de son espèce, un lézard marin du crétacé qui ressemble à un requin ou encore une vie microbienne improbable vieille d’un demi milliard d’années. Trois découvertes majeures révélées en à peine quelques semaines. Le Maroc offre décidément un terrain de chasse de choix pour les paléontologues qui ne sont pas prêts de s’en lasser…
«Le niveau de détail du fossile est incroyable, sa structure est si complexe qu’il nous a fallu un certain temps pour en comprendre la signification». L’homme qui s’extasie devant cette remarquable pièce d’un autre âge s’appelle Aaron W. Hunter, chef du département des sciences de la Terre de l’Université de Cambridge (Angleterre). C’est avec le même enthousiasme que son équipe et lui rédigent un article scientifique, relayé en janvier dernier par la prestigieuse institution britannique The Royal Society, où ils livrent les détails de leur étude du fossile d’une étoile de mer qui remonte à 480 millions d’années. Un objet précieux découvert dans le schiste de Fezouata à Zagora, dans le centre de l’Anti-Atlas marocain. Un site qui offre à la créature le nom savant de «Cantabrigiaster fezouataensis». Ce qu’il faut surtout retenir de ce fossile, c’est qu’il permet aux scientifiques de faire un lien entre un monde ancien, l’Ordovicien (entre 400.000 et 1.5 millions d’années) et le monde moderne. Car, comme l’explique le professeur Hunter, les étoiles de mers «sont l’une des premières espèces modernes». Pour lui, le fossile marocain est «ce lien manquant avec leurs ancêtres». Cette remarquable découverte aurait pu, à elle seule, marquer l’actualité scientifique au Maroc. Pourtant, la série ne s’arrête pas là.
À la mi-janvier, une autre prestigieuse publication, GEO Magazine, révèle la découverte d’un nouveau mosasaure, lézard marin aux dents de requins, qui vivait au Crétacé il y a 66 à millions d’années. Cette fois, nous devons cette nouvelle à une collaboration internationale des chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle – CNRS – Sorbonne Université, (dont le paléontologue marocain Noureddine Jalil), de l’université de Bath et celle d’Utrecht. Les scientifiques décrivent «un mosasaure de la taille d’un marsouin, vivant dans une mer tropicale et peu profonde, étendue sur une partie du Maroc actuel». À l’époque donc, une partie du Maroc est sous l’eau. Une réalité confirmée par de précédentes découvertes de dinosaures aquatiques dans le royaume. Mais il est possible de remonter encore plus loin, il y a 500 millions d’années, date à laquelle se développait une vie microbienne extrémophile en milieux confinés. En clair, une minuscule forme de vie qui s’accommode des conditions extrêmes, comme c’était le cas à cette période. Le Marocain Abderrazak El Albani, professeur à l’Institut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers (Université de Poitiers/CNRS) et directeur de l’équipe internationale pluridisciplinaire auteure de la découverte en janvier dernier, explique que le microbe vivait dans un milieu «qui pourrait être analogue à ce que l’on pourrait trouver sur la planète Mars». La localité d’Amane Tazgart près de Ouarzazate, où a été trouvé le microbe ressemblait donc, il y a un demi milliard d’années, à une autre planète… Pourquoi donc les découvertes marocaines de ce type se bousculent sans arrêt ? Le dénominateur commun s’appelle le phosphate, minerai parfait pour la conservation des fossiles. Ce qui prouve que la richesse n’est pas toujours là où on l’attend…