Avant de devenir citoyens à part entière, les Marocains ont longtemps été considérés comme une «Ra’iya» qui se définit uniquement, ou presque, par rapport à son maître : le sultan. Retour sur une évolution lente et complexe, qui s’est étalée sur plusieurs siècles.
Entre le dernier tiers du XIXème siècle et le début du XXème, on peut identifier trois types de documents susceptibles de nous éclairer sur l’itinéraire du concept de Ra’iya : la littérature politique makhzénienne, les chroniques de voyages et les premiers projets constitutionnels. S’il est vrai que la situation globale du Maroc au XIXème siècle et les événements qui ont marqué l’époque (occupation de l’Algérie, défaite d’Isly, guerre de Tétouan, menaces d’occupation, troubles sociaux, déliquescence de l’appareil étatique) ont poussé les réformateurs marocains à centrer leurs discours sur l’État, il serait déplacé d’attendre des réponses à des questions qu’ils n’ont pas posées. La littérature makhzénienne du XIXème siècle témoigne, comme l’a expliqué Abdallah Laroui à propos d’Akansus, d’un «irréalisme» surprenant, comme si rien, absolument rien, ne s’était passé. Elle ne fait que reproduire exactement ce que al-Adab al-Sultani avait déjà mâché et remâché. Ces textes sont pleins de réminiscences et n’ajoutent rien aux classiques du genre.
Par Azzeddine Allam
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