Il se faisait appeler «Khamroun» (littéralement «l’enivré») et il incarnait une certaine vie de bohème dans le vieux et beau Casablanca des années 1960-1970. Un hommage en prose.
Souvent, lorsque la ville est ombragée par son splendide crépuscule ou par des nuages orphelins, il se livre, à une heure presque fixe, bouquet de menthe odorante à la main, à la même promenade à Mers Sultan, en quête de stations d’affinités, toujours prêt à égrener des fugues qui unissent refrains de l’enfance et bréviaires aux rebonds imprévisibles, échos rieurs et chansons rêveuses, rimes, souvenirs chaleureux de baume et maximes.
«Un homme c’est toute l’époque, comme une vague est toute la mer». Cette sentence de Sartre sied fort bien à cet étonnant aimant heureux de la parole et du rire qui est emblématique du Maroc des années 1960 où la double injonction, «écoute» de la magique radio, et «lis» des maîtres-livres de l’école, était un guide patient sur le chemin des initiations à l’existence sous le clair de la lune pourpre. Arpenteur des rues de la ville, il aime déambuler dans les replis de la mémoire et partager dans une complicité enchantée ou dans un regret discret des grappes de souvenirs.
Par Rédouane Taouil
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