A l’heure des supposés changements, le chantier de la justice semble être le plus sinistré. L’urgence de la réforme est de plus en plus pressante. Le Maroc se donne-t-il les moyens de relever l’un des plus grands défis de son histoire contemporaine ? Le citoyen va-t-il enfin pouvoir faire confiance à la justice de son pays ?
S’il est bien un domaine qui n’inspire aucune confiance chez le citoyen marocain, c’est certainement celui de la justice. Depuis trop longtemps, le régime marocain manipule ce que les chartes internationales s’accordent à définir comme un droit humain prioritaire. La liberté et le progrès sont indéniablement liés à un système judiciaire efficace et indépendant. Avant même la mise en place de la nouvelle Constitution, le roi Mohammed VI, à travers ses discours, semblait en faire une priorité. Seulement, un an après l’instauration du nouveau texte, la réforme de la justice nourrit toujours autant le scepticisme. Les procès politiques fomentés par une justice aux ordres sont redevenus monnaie courante. Et que dire des dossiers de droit commun, qui ne cessent de décourager les citoyens d’user de leur droit légitime d’avoir recours à la justice. Pour la plupart d’entre eux, la question ne se pose même pas vu la difficulté d’y avoir seulement accès. Encore une fois, l’éternel débat sur la nécessité et la possibilité ou non de changer les mentalités prévaut. Depuis longtemps déjà, les textes existants auraient pu aider à bousculer le domaine judiciaire, plutôt confortablement installé sur un matelas d’impunité. Il serait naïf de penser que juges et magistrats peuvent engager un véritable bras de fer pour obtenir, si ce n’est une indépendance totale, du moins une forme d’autonomie dans leur travail. A l’aube des années 1960, la monarchie avait autant à craindre de la justice que de l’armée. Très vite, Hassan II, n’ignorant pas le danger, s’est attelé à museler un des piliers de ce qui aurait pu devenir un Etat moderne. Aujourd’hui, le domaine judiciaire semble incarner à lui tout seul le côté « traditionnel » dont s’enorgueillit le Maroc. A moins que… La Haute commission du dialogue national sur la réforme de la justice a vu le jour le 8 mai 2012. Désirée par le roi, elle a pour mission de donner corps à la nouvelle Constitution. Rédigée en un temps record, cette dernière demeure caduque si elle n’est pas accompagnée de textes organiques, définissant dans le détail les prérogatives de la justice. Abdellatif Hatimy et Mohammed Zenzami engagent le débat pour Zamane. La question qui se pose est en apparence simple : une réforme de la justice au Maroc est-elle possible ?
Par Sami Lakmahri
Lire la suite dans Zamane N°24