La mystérieuse abdication de Moulay Slimane – Zamane

S’il avait vraiment abdiqué en cet été de 1820, Moulay Slimane serait le seul sultan alaouite à avoir abdiqué de son plein gré ! S’agissait-il réellement d’une abdication ou d’un détrônement ?

Pour l’historien, la vérité est souvent travestie par les tentatives des acteurs politiques lesquels voudraient chacun faire passer leur version des choses. La version dominante est souvent celle des pouvoirs dominants. Ainsi, les historiographes officiels du Makhzen ont toujours nié que le sultan Moulay Slimane (1792-1822) ait abdiqué. Pour eux, il s’agissait tout simplement d’une rébellion qui, en fin de compte, avait échoué. Ce que l’historien Ennaciri qualifie de « fitnat Fass », ou la rébellion de Fès, qui avait abouti à la fin de 1820 au remplacement de Moulay Slimane par un autre prince, n’était pas un événement limité à la seule ville de Fès. Plus qu’une insurrection urbaine, il s’agissait en effet d’une vraie crise dynastique qui, pendant près de deux ans, avait jeté tout le pays dans un chaos total accompagné par un quasi-effondrement de l’État.
Au cours de l’année 1817, le Maroc est frappé par une famine, résultat d’une sécheresse qui avait commencé déjà en 1816. Sécheresse désolante « dont on a peu d’exemples dans ce pays », écrivait Édouard Sourdeau, le consul français à Rabat. Un autre diplomate français rapporte qu’avec la sécheresse « les mosquées et les chemins sont couverts de Maures (lisez « musulmans »), de Juifs qui prient le ciel de les délivrer de l’inquiétude que leur donne le manque de pluie ». Au cours de l’année 1817, les céréales avaient atteint des prix record. Et par malchance, le sultan décida d’autoriser les Français à exporter du blé à partir de Rabat, alors que ses sujets peinaient à s’approvisionner pour survivre. Sultan qu’on a  pourtant qualifié de xénophobe et dont le souhait le plus cher aurait été de n’avoir aucune relation avec les chrétiens ! C’est que les caisses du Makhzen avaient été mises à rude épreuve par cette même sécheresse et le sultan avait un besoin pressant de numéraire pour payer ses troupes !